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RIENZI.

— Maraud ? oses-tu bien me tenir tête ? s’écria le farouche Orsini, et de son sabre il fendit le bâton en deux.

— Au nom du vicaire, je vous somme de reculer, dit le garde obstiné, plaçant maintenant son énorme masse au beau milieu de la route du noble.

— C’est Cecco del Vecchio ! crièrent ceux de la populace qui étaient assez proches pour voir cet incident.

— Oui, dit l’un, le bon vicaire a revêtu un grand nombre des plus robustes gaillards de la livrée du pape, afin de maintenir le bon ordre. Il n’en pouvait choisir de meilleur que Cecco.

— Mais il ne faut pas le laisser succomber ! cria un autre, en voyant Orsini lancer au forgeron un regard brûlant, et ramener son sabre comme pour le lui enfoncer dans la poitrine.

— C’est affreux ! c’est abominable ! Le pape sera-t-il insulté ainsi en sa propre ville ? crièrent plusieurs voix. À bas le sacrilége ! à bas ! »

Et, comme d’un commun accord, une masse de peuple, s’élançant du coup au travers de la haie, balaya comme un torrent Orsini avec sa suite confuse et mal assortie. Orsini lui-même fut violemment culbuté par terre et foulé aux pieds de plus de cent personnes ; ses hommes, poussés, pressés, se débattant les uns contre les autres autant que contre la multitude, furent dispersés et renversés ; et quand les gardes dirigés par le forgeron lui-même eurent à grand’peine rétabli le bon ordre et reformé la haie, Orsini, presque étouffé de rage et d’humiliation, terriblement meurtri par les rudes assauts dont il avait été l’objet, put à peine se relever. Les officiers du pape vinrent à son aide ; une fois qu’il fut sur ses jambes, ses yeux hagards cherchèrent autour de lui son épée, qui, tombant de sa main, avait été emportée par les coups de pied de la foule ; ne la voyant point, il murmura en grinçant des dents à Cecco del Vecchio :