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RIENZI.

de piques et de cottes de mailles, soit d’armes moins guerrières et plus mal fabriquées, suivait les cavaliers ; et bien au-dessus des plumes et des piques flottait la bannière des Orsini, bannière d’un rouge de sang, portant en brillantes lettres d’or l’épigraphe et la devise où était pompeusement déployé le symbole guelfe des clefs de saint Pierre. Une crainte momentanée traversa l’esprit du jeune garçon ; car à cette époque, et dans cette cité, un noble, une fois ceint de ses hommes d’armes, était plus redouté de la plèbe qu’une bête féroce ; mais déjà il était trop tard pour s’enfuir ; la troupe était sur ses talons.

« Hé garçon ! » cria le chef des cavaliers, Martino di Porto, un des membres de la grande maison des Orsini, « As-tu vu une embarcation remonter le fleuve ? — Mais tu dois l’avoir vue. — Combien y a-t-il de temps ?

— J’ai vu un grand bateau il y a près d’une demi-heure, répondit l’adolescent, terrifié par la rude voix et l’impérieuse allure du cavalier.

— Faisant voile droit devant lui, avec un pavillon vert en poupe ?

— C’est cela même, noble sire.

— En avant, alors ! Nous arrêterons sa course avant que la lune se lève, dit le baron. En avant ! Que le garçon vienne avec nous, de peur qu’il ne nous trahisse et ne donne l’alarme aux Colonna.

— Aux Orsini ! aux Orsini ! cria la multitude : en avant ! en avant ! » et, malgré ses prières et ses représentations, notre jeune garçon fut placé au plus épais de la foule, et emporté, ou plutôt entraîné avec le reste, épouvanté, hors d’haleine, pleurant presque, portant toujours pendante à son bras sa pauvre petite guirlande, tandis qu’on lui mettait, malgré lui, une fronde dans la main.

Mais à travers toute sa frayeur il éprouvait toujours une sorte de curiosité enfantine à voir le résultat de cette poursuite.