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RIENZI.

« Sire chevalier, dit-il, sire chevalier, comme il refermait la porte sur Adrien et attirait Montréal dans l’embrasure de la fenêtre. Un mot à l’oreille ! N’allez pas croire que je dédaigne votre offre, mais il faut ménager ces jeunes gens ; ce complot est grand, noble, il souriait à mon cœur, mais il exige du temps et de la prudence. J’ai bien des membres de ma famille difficiles à gagner avec leurs scrupules comme cette tête chaude ; le plan est bon, mais il faut l’étudier soigneusement. Vous comprenez ? »

Par-dessous ses sourcils baissés, Montréal lança un coup d’œil perçant à Étienne et répondit ensuite :

« Mon amitié pour vous me dictait cette offre. La ligue peut se passer des Colonna ; prenez garde qu’il ne vienne un moment où les Colonna ne pourront pas se passer de la ligue. Monseigneur, regardez bien autour de vous ; il y a, à Rome, plus d’hommes libres que vous ne croyez ; oui, et des hommes hardis et remuants. Prenez garde à Rienzi ! Adieu, nous nous reverrons bientôt. »

Là-dessus Montréal partit, et en traversant de son pas dégagé la foule de l’antichambre il se disait :

« Je n’ai rien à faire ici ! Ces poltrons de nobles n’ont ni le courage d’être grands, ni la sagesse d’être honnêtes. Laissons-les tomber. Je puis trouver un aventurier sorti du peuple, un aventurier comme moi-même, qui vaille autant qu’eux tous. »

Aussitôt qu’il fut retourné auprès d’Adrien, Étienne serra affectueusement dans ses bras son pupille, qui préparait sa fierté à subir quelque sévère réprimande pour sa pétulance.

« Bien joué, admirable ! admirable ! s’écriait le baron. Vous avez appris réellement l’art de l’homme d’État à la cour de l’empereur. J’en étais sûr, je l’avais toujours dit. Vous avez vu l’embarras où j’étais, surpris ainsi par le plan de ce fou, de ce barbare. Je craignais de refuser, je