Page:Lytton - Rienzi, le dernier des tribuns de Rome, tome 1, 1865.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.
116
RIENZI.

solut de faire un écart sur sa route, pour aller reconnaître la cause de cette apparition. À son insu, le pas martial du barbare traversa l’emplacement du fameux ou plutôt de l’infâme temple d’Isis, autrefois témoin de ces orgies affreuses rappelées par Juvénal ; et il arriva enfin à un taillis sombre, épais, au centre duquel la lumière mystérieuse rayonnait par une ouverture. Pénétrant le ténébreux feuillage, le chevalier se trouva bientôt devant une vaste ruine, grise et sans toiture ; on entendait, à l’intérieur, des sons vagues et étouffés, mais c’étaient des voix humaines. À travers une fissure de la muraille, qui formait, à près de dix pieds du sol, une sorte de fenêtre, on voyait le sol humide mais recouvert de nattes, éclairé par la lumière enfouie, pour ainsi dire, dans de grandes masses d’ombre, et s’écoulant comme un torrent tout près de là, par un portique en ruine. Sans le savoir, le provençal était sur la place même autrefois consacrée par le temple, dans le portique et la bibliothèque de la Liberté (la première bibliothèque publique instituée à Rome). Les murs de cette ruine étaient recouverts d’une foule de plantes grimpantes et de broussailles sauvages, et Montréal n’avait pas besoin d’une bien grande agilité pour s’élever, au moyen de ces buissons, jusqu’à cette ouverture, et regarder au dedans, caché par un feuillage des plus épais. Il y vit une table éclairée par des torches, au milieu de laquelle était un crucifix, un poignard dégaîné, un parchemin ouvert, dont le caractère sacré se fera connaître plus tard, et une coupe d’airain. Tout à l’entour, immobiles, se tenaient à peu près cent hommes, en manteaux et en masques noirs ; un seul, plus grand que les autres, sans déguisement ni masque, dont le front pâle et les traits rigides étaient encore plus pâles et plus rigides en face de cette lumière, semblait terminer un discours à ses compagnons.

« Oui, disait-il, c’est dans l’église de Saint-Jean de