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LES DERNIERS JOURS

Où nous allons tous.
Doucement, barque fugitive,
Doucement, vents jaloux !
Fleurissons les heures moroses,
Et narguons le sort ;
Au milieu des chants et des roses
Voguons vers la mort.


Après un léger repos, la musique recommença avec une mesure plus vive et plus brillante encore.


Puisque la vie est si rapide
Gardons-nous de perdre un seul jour ;
Jeunesse, dans ta coupe humide,
Buvons la perle de l’amour.


Un troisième groupe s’approcha avec des coupes pleines jusqu’au bord, qu’on répandit en libations sur cet étrange autel. La musique changea encore sa mélodie, et reprit d’un ton lent et solennel :


Sois le bienvenu, ténébreux convive,
Qui des bords lointains jusqu’à nous arrive.
Quand nos fleurs à nous tomberont un soir,
À ta table aussi nous irons nous seoir.
Sois le bienvenu.

Qui mérite mieux notre hommage
Convive, qui dois un jour,
Au bord de l’éternel rivage
Nous fêter tous à notre tour !
Mais cependant puissions-nous vivre
Longtemps pour égayer ton front,
Convive, que nous devons suivre
Dans l’empire noir et profond !


En ce moment, la jeune fille assise près d’Apœcides continùa soudain la chanson :


Heureuse encore est notre destinée :
Terre et soleil, voilà notre trésor !
Chaque heure ici, riante et fortunée,
Loin des tombeaux, prend un brillant essor.
Douce est pour toi cette coupe écumante,
Doux sont tes yeux, mon hien-aimé, mon roi.
Doux sont les miens ; regarde ton amante ;
La tourterelle est moins tendre que moi.

Laisse, laisse ma tête