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DE POMPÉI

malgré cela, de jeter dans mon réservoir ungros maître d’hôtel que je possède ; je suis sûr que sa chair donnerait aupoisson la plus exquise saveur. Mais les esclaves ne sont plus des esclaves aujourd’hui, et n’ont plus de sympathies pour les intérêts de leurs maîtres ; sans quoi Davus se livrerait lui-même aux lamproies pour m’obliger.

— Quelles nouvelles de Rome ? dit Lépidus en s’approchant du groupe d’un air languissant.

— L’empereur a donné un splendide souper aux sénateurs, répondit Salluste.

— C’est un bon prince, dit Lépidus ; on assure qu’il ne renvoie jamais personne sans lui accorder sa requête.

— Peut-être me laisserait-il jeter un esclave dans mon réservoir, se hâta d’ajouter Salluste.

— Cela se pourrait bien, dit Glaucus, car pour faire une faveur à un Romain, il faut d’abord que ce soit toujours aux dépens d’un autre. Soyez certain que chaque sourire de Titus a causé bien des larmes.

— Longue vie à Titus ! cria Pansa en entendant prononcer le nom de l’empereur, au moment où il s’avançait d’un air de protection dans la foule ; il a promis une place de questeur à mon frère, qui a perdu sa fortune.

— Et qui souhaite de la refaire aux dépens du peuple, n’estce pas, cher Pansa ? dit Glaucus.

— Assurément, répondit Pansa.

— Voilà comment le peuple sert à quelque chose, continua Glaucus.

— Sans doute, poursuivit Pansa ; mais il faut que j’aille visiter l’ærarium, qui a besoin d’être réparé. »

Alors, en se donnant beaucoup d’importance, l’édile s’éloigna accompagné d’une longue suite de clients qui se distinguaient du reste de la foule par leurs toges (car les toges, marque autrefois de la liberté, étaient devenues un signe de servilité envers le patron).

« Pauvre Pansa ! dit Lépidus, il n’a jamais le temps de prendre un plaisir. Le ciel soit loué de ce que je ne suis pas édile !

— Ah ! Glaucus, comment vous portez-vous ? Toujours gai ? s’écria Claudius en se joignant au groupe.

— Êtes-vous venu pour faire un sacrifice à la Fortune ? dit Salluste. — Je sacrifie à la Fortune toutes les nuits, répondit le joueur.