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LES DERNIERS JOURS

Cicéron, peut-être par l’orateur lui-même) prêtait un caractère vénérable et imposant à une scène plus brillante d’ail. leurs que majestueuse. Ce temple était un des plus gracieux modèles de l’architecture romaine. Il était élevé sur un podium assez considérable, et l’on voyait l’autel de la déesse entre deux escaliers conduisant à une plate-forme. De cette plateforme un autre escalier allait joindre le portique aux colonnes cannelées, auquel étaient suspendues des guirlandes de fleurs. Aux deux extrémités du temple on voyait deux statues dues à l’art de la Grèce ; et à peu de distance du temple l’arc de triomphe se dressait avec une statue équestre de Caligula, flanquée de trophées en bronze. Une foule animée était rassemblée dans l’espace qui précédait le temple : les uns assis sur des bancs, et discutant la politique de l’empire ; les autres s’entretenant du prochain spectacle de l’amphithéâtre. Un groupe de jeunes gens faisait l’éloge d’une beauté nouvelle ; un autre s’occupait des mérites de la-dernière pièce de théâtre ; un troisième groupe, d’un âge plus respectable, calculait les chances du commerce d’Alexandrie ; celui-là était particulièrement composé de marchands en costume oriental, aux robes flottantes, avec pantoufles ornées de pierreries. Leur maintien sérieux formait un frappant contraste avec les tuniques serrées et les gestes expressifs des Italiens : car ce peuple, impatient et aimable, avait alors, comme à présent, un langage distinct de la parole, langage de signes et de mouvements des plus vifs et des plus significatifs ; ses descendants l’ont conservé, et le savant Jorio a composé un très-intéressant ouvrage sur cette espèce de gesticulation hiéroglyphique.

Glaucus, en pénétrant d’un pas léger dans cette foule, se trouva bientôt au milieu de ses amis les plus gais et les plus dissipés.

« Ah ! dit Salluste, il y a un lustre que je ne vous ai vu.

— Et comment avez-vous passé ce lustre ? quels nouveaux mets avez-vous découverts ?

— J’ai donné mon temps à la science, répondit Salluste, et j’ai fait des expériences sur la manière de nourrir les lamproies. J’avoue que je désespère de les amener au point de perfection que nos ancêtres romains avaient obtenu.

— Malheureux Salluste ! Et pourquoi ?

— Parce que, reprit-il eu soupirant, il n’est plus permis de leur donner quelque esclave à manger. J’ai été souvent tenté,