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DE POMPÉI

maisons et dans nos âmes. C’est à l’aide de ces petites intrigues de la vie que nous nous reconnaissons dans le passé.

L’Égyptien avait attaqué avec beaucoup d’adresse le côté faible d’Ione ; il avait habilement dirigé son dard empoisonné contre son orgueil ; il crut qu’il avait porté une mortelle atteinte à ce qu’il regardait, d’après le peu de temps que Glaucus et Ione se connaissaient, comme une fantaisie naissante ; et, se hâtant de changer de sujet, il mit la conversation sur le chapitre du frère d’Ione. L’entretien ne fut pas long. Il la quitta, bien résolu à ne plus se fier autant à l’absence, mais à la visiter et à la surveiller chaque jour.

À peine l’ombre d’Arbacès eut-elle disparu de cette demeure, que tout orgueil, toute dissimulation de femme abandonna la victime de ses desseins ; la superbe Ione versa un torrent de larmes passionnées.


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CHAPITRE VII.

La vie oisive à Pompéi. — Tableau en miniature des bains de Rome.


Lorsque Glaucus quitta Ione, il lui sembla qu’il avait des ailes. Dans l’entrevue dont elle l’avait favorisé, il avait compris distinctement, pour la première fois, que son amour n’était pas mal accueilli, et qu’il pourrait en obtenir la douce récompense. Cette espérance le remplissait d’un ravissement tel, que la terre et le ciel lui paraissaient trop étroits pour qu’il respirât à son aise. Sans se douter qu’il venait de laisser un ennemi derrière lui, et oubliant non-seulement les insultes, mais même la propre existence d’Arbacès, Glaucus traversa de joyeuses rues en fredonnant, dans l’ivresse de son âme, la musique de l’air qu’Ione avait écouté avec tant d’intérêt. Il entra dans la rue de la Fortune, qui était garnie d’un haut trottoir, et dont les maisons, peintes au dehors et au dedans, laissaient voir de tous côtés leurs fresques éclatantes ; au bout de chaque rue s’élevait un arc de triomphe. Au moment où Glaucus arrivait devant le temple de la Fortune, le portique avancé de ce magnifique temple (qu’on suppose avoir été bâti par un des membres de la famille de