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LES DERNIERS JOURS


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CHAPITRE IX.

Désespoir des amants. — Situation de la multitude.


Glaucus se retourna avec un sentiment de joie et de terreur à la fois ; il prit de nouveau Ione dans ses bras, et courut le long de la rue, qui était encore lumineuse ; mais une ombre épaisse revint envahir les airs. Il reporta instinctivement ses regards vers la montagne, et vit l’une des deux gigantesques crêtes de son sommet divisé se briser et se balancer ; et puis, avec un bruit dont aucune langue au monde ne pourrait donner une idée, elle roula de sa brûlante base, en avalanche de feu, sur les versants de la montagne ; au même instant, un volume considérable de fumée se répandit dans l’air, sur la terre et sur la mer.

Une autre, une autre encore, et puis encore une autre pluie de cendres, toutes plus abondantes qu’auparavant, vinrent renouveler la désolation dans les rues. L’obscurité les enveloppait de nouveau comme un voile ; et Glaucus, dont le courage commençait à s’abattre, le désespoir dans le cœur, se réfugia sous une arche, et serrant dans ses bras Ione, son épouse, sur un lit de ruines, se résigna à mourir.

Pendant ce temps-là, Nydia, séparée de Glaucus et d’Ione, comme nous l’avons vu, cherchait en vain à les rejoindre. En vain poussait-elle le cri plaintif et familier aux aveugles ; il se perdait parmi les mille cris des terreurs égoïstes. Elle retourna plusieurs fois à l’endroit où elle les avait perdus ; elle ne retrouva pas ses compagnons ; elle s’attachait à chaque fugitif ; elle s’informait de Glaucus ; elle était repoussée par l’impatience de gens occupés d’eux-mêmes et non des autres. Qui donc, à cette heure, donnait une pensée à son voisin ? Dans ces scènes de désastre universel, rien n’est plus horrible peut-être que l’égoïsme dénaturé qu’elles engendrent. Enfin, il vint à l’esprit de Nydia que, puisqu’il avait été résolu de chercher le salut en s’embarquant, la chance laplus favorable qu’elle avait de retrouver ses compagnons était de prendre la direction de la mer. Guidant sa marche à l’aide du bâton qu’elle portait toujours, elle continua d’éviter, avec une incroyable