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LES DERNIERS JOURS

fut là que Julia, Claudius, la mère et son enfant, la plus grande partie des esclaves, et quelques visiteurs effrayés et des clients du voisinage, cherchèrent un abri.


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CHAPITRE VII.

Les progrès de la destruction.


Le nuage qui avait répandu une si profonde obscurité sur le jour s’était condensé en une masse solide et impénétrable. Il ressemblait moins aux ténèbres de la nuit en plein air qu’à celles d’une chambre étroite où la lumière ne pénètre pas[1] ; mais à mesure que ces ténèbres augmentaient, les éclairs qui partaient du Vésuve étaient plus formidables et plus lumineux. Leur horrible beauté ne se bornait pas aux couleurs habituelles du feu ; jamais arc-en-ciel n’égala leurs teintes changeantes et variées. Tantôt elles paraissaient bleues comme l’azur le plus profond de la mer du Sud, tantôt vertes et livides comme la peau d’un serpent. Les éclairs affectaient parfois la forme et les replis de ces énormes reptiles ; d’autres fois c’était un rouge ardent et intolérable, qui, éclatant à travers des colonnes de fumée, illuminait laville entière, puis expirait tout à coup, devenant sombre et pâle comme un fantôme de lumière.

Dans l’intervalle des pluies on entendait le bruit qui se faisait sous terre, et les vagues grondantes dela mer tourmentée ; ou plus bas encore, et perceptible seulement pour une oreille attentive et pleine de craintes, le murmure sifflant des gaz qui s’échappaient des crevasses de la montagne lointaine. Par moments le nuage paraissait briser sa masse solide et offrir, à la lueur des éclairs, des formes d’hommes ou de monstres se poursuivant, se heurtant et s’évanouissant, après ces combats moqueurs, dans le turbulent abîme de l’ombre : de sorte que, aux yeux et à l’esprit des voyageurs effrayés, ces vapeurs sans substance paraissaient de gigantesques ennemis, ministres de la terreur et de la mort[2].

  1. Pline.
  2. Dion Cassius.