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LES DERNIERS JOURS

Et ce cri retentit de la colline à la vallée, du rivage à la mer… Arbacès au lion !

« Gardes, ramenez l’accusé Glaucus ; ramenez-le-moi, mais veillez sur lui, dit le préteur. Les dieux prodiguent aujourd’hui leurs merveilles. »

Quand le préteur donna cet ordre de délivrance, il y eut un cri de joie, un cri de femme, un cri d’enfant qui remua les cœurs avec une force électrique, tant était touchante et pure la voix de la jeune fille qui l’avait proféré ! La populace entière y répondit par un puissant écho, avec une vive et flatteuse sympathie.

« Silence, dit le préteur. Qui est là ?

— La jeune fille aveugle, Nydia, répliqua Salluste ; c’est sa main qui a ravi Calénus à la tombe et délivré Glaucus du lion.

— Nous nous ocuperons d’elle après, dit le préteur. Calénus, prêtre d’Isis, tu accuses Arbacès du meurtre d’Apœcides ?

— Je l’accuse.

— Tu as vu le fait ?

— Préteur, de mes propres yeux.

— C’est assez pour le moment. Les détails doivent être réservés pour un autre lieu et pour un autre temps. Arbacès d’Égypte, tu entends l’accusation qu’on porte contre toi. Qu’as-tu à dire ? »

Les regards de la foule avaient été longtemps attachés sur Arbacès ; il avait montré quelque embarras à l’entrée de Salluste et à celle de Calénus ; aux cris d’Arbacès au lion ! il avait tremblé, et le bronze de ses joues avait pris une couleur plus pâle ; mais il avait bientôt recouvré sa hardiesse et son sangfroid ; il rendit un regard plein d’arrogance aux mille regards de la foule ; en répondant à la question du préteur il dit, avec cet accent de tranquillité et le ton imposant qui lui étaient naturels :

« Préteur, cette accusation est si insensée, qu’elle mérite à peine une réponse. Mon premier accusateur est le noble Salluste… un intime ami de Glaucus… Le second est un prêtre. Je révère sa robe et sa profession… mais, habitants de Pompéi… vous connaissez un peu le caractère de Calénus… il est avide… son amour pour l’argent est proverbial… le témoignage de pareils hommes peut s’acheter… Préteur, je suis innocent.

— Salluste, dit le magistrat, où avez-vous trouvé Calénus ?

— Dans le cachot d’Arbacès.