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DE POMPÉI

« Que veut dire ceci ? Prenez l’aiguillon, forcez-le de sortir, et puis fermez la porte de la cage. »

Alors que le gardien, avec quelque frayeur et plus d’étonnement encore, se disposait à obéir, on entendit un cri à l’une des entrées de l’arène ; il y eut une confusion, un trouble quelques remontrances semblèrent éclater, mais la réplique les fit taire. Tous les yeux se tournèrent du côté d’où venait cette interruption la foule en cet endroit s’ouvrait, et Salluste apparut soudain sur le banc sénatorial, les cheveux en désordre, haletant, suant, à moitié épuisé ! Il regarda autour de lui. « Faites sortir l’Athénien de l’arène, s’écria-t —il ; dépêchez-vous, il est innocent ! Arrêtez Arbacès l’Égyptien ; c’est lui qui est le meurtrier d’Apœcides !

— Êtes-vous fou, Salluste ? dit le préteur en se levant de son siège. D’où vient ce délire ?

— Éloignez l’Athénien, éloignez-le vite, ou son sang retombera sur vos têtes. Préteur, suspends l’exécution, ou ta vie en répondra à l’empereur. J’amène avec moi un témoin de l’assassinat du prêtre Apœcides… Faites place !… Reculez-vous !… Livrez passage ! Peuple de Pompéi !… lève tes yeux sur Arbacès… Il est assis en ce lieu… Faites place au prêtre Calénus. »

Pâle, hagard, comme un homme qui vient de sortir des dents de la famine et de la mort, la face abattue, les yeux ternes comme ceux d’un vautour, son corps puissant passé à l’état de squelette, Calénus se vit porté sur le banc même où Arbacès était assis. Ses libérateurs lui avaient ménagé les aliments ; mais ce qui le soutenait le mieux, c’était le désir de se venger.

« Le prêtre Calénus !. Calénus ! cria la foule… Est-ce bien lui ? non, c’est son spectre.

— C’est bien le prêtre Calénus ! dit le préteur gravement. Qu’as-tu à dire ?

— Arbacès l’Égyptien est le meurtrier d’Apœcides, le prêtre d’Isis. Mes yeux l’ont vu porter le coup. C’est du cachot où il m’a plongé, c’est de l’obscurité et de l’horreur de la mort, de la mort parla famine, que les dieux m’ont retiré pour dénoncer son crime. Éloignez l’Athénien de l’arène… Il est innocent.

— C’est donc pour cela que le lion l’a épargné lui-même… Un miracle ! un miracle ! s’écria Pansa.

— Un miracle ! un miracle ! répéta le peuple. Délivrez l’Athénien. Arbacès au lion ! »