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LES DERNIERS JOURS

son front. Ses cheveux bouclés, sa courte barbe, ses nobles traits romains, et son œil brillant et noir, conquirent l’admiration générale ; il était dispos, sans blessure, il ne paraissait pas fatigué.

L’editor s’arrêta et proclama tout haut que la blessure de Niger l’empêchait de rentrer dans l’arène. Lydon devait succéder à Nepimus qui venait d’être tué, et combattre à son tour Eumolpus.

« Cependant Lydon, ajouta-t-il, si tu veux décliner le combat avec un homme si brave et si éprouvé, tu en as le droit. Eumolpus n’est pas l’adversaire qui t’était destiné dans l’origine, tu sais mieux que personne si tu es en état de te mesurer avec lui. Si tu succombes, ce ne sera pas sans gloire ; si tu triomphes, je doublerai de ma propre bourse le prix stipulé pour toi. »

Le peuple fit éclater de grands applaudissements. Lydon se tenait dans la lice : il jeta les yeux autour de lui, il aperçut au loin sur ces hauts gradins la figure pâle, les yeux fixes de son vieux père ; il demeura irrésolu un moment. Non, la victoire du reste n’était pas suffisante… il n’avait pas encore remporté le prix qu’il voulait… son père était encore esclave.

« Noble édile, dit-il, d’un ton ferme, je ne recule pas devant ce combat… pour l’honneur de Pompéi je demande qu’un homme instruit par son célèbre lanista combatte le Romain. »

Les applaudissements du peuple devinrent plus vifs.

« Quatre contre un pour l’autre, dit Claudius à Lépidus.

— Je n’accepterais pas vingt contre un. Eumolpus est un véritable Achille, et ce pauvre garçon n’est qu’un tiro. »

Eumolpus regarda attentivement Lydon et sourit. Cependant ce sourire fut suivi d’un léger soupir à peine entendu ; mouvement de compassion étouffé dans le cœur au moment où il s’y faisait sentir.

Tous deux alors, revêtus d’armures, l’épée tirée, la visière baissée, derniers combattants de l’arène (avant que les hommes fussent livrés aux bêtes) se mirent en face l’un de l’autre.

Dans ce moment un des employés de l’arène remit une lettre au préteur, qui en retira l’enveloppe et parcourut l’écrit des yeux ; ses traits exprimèrent la surprise et l’embarras. Il lut de nouveau la lettre, et murmura : « Allons, c’est impossible ; il fallait que cet homme fût ivre dès le matin pour écrire de pareilles folies… » Il mit la lettre de côté, et se re-