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LES DERNIERS JOURS

de cette constitution enfin qui paraît donner en force tout ce qu’elle enlève en grâce. Mais Lydon, quoique élancé jusqu’à friser la maigreur, était admirablement proportionné dans sa délicatesse ; les connaisseurs pouvaient s’apercevoir que ses muscles, moins gros que ceux de son adversaire, étaient plus compactes, et pour ainsi dire de fer. En proportion aussi, il avait d’autant plus d’activité qu’il était moins chargé d’embonpoint, et un hautain sourire sur sa figure résolue, qui contrastait avec l’expression pesante et stupide de son adversaire, donnait confiance à ceux qui le regardaient, et inspirait à la fois l’espérance et un sentiment de bienveillance ; en sorte que, malgré la différence apparente de leur force, les souhaits de la multitude se rangeaient du côté de Lydon aussi bien que du côté de Tétraidès.

Quiconque a assisté à une lutte de nos jours, quiconque a pu apprécier les coups terribles que le poing d’un homme est capable de porter, lorsqu’il est dirigé par l’art, peut se faire une idée de la facilité qu’y ajoutait une bande de cuir s’enlaçant autour du bras jusqu’au coude et renforcée aux jointures des doigts par une plaque de fer, quelquefois même par un morceau de plomb. Mais, au lieu d’augmenter, comme on croyait le faire par là, l’intérêt du combat, cette précaution le diminuait peut-être ; car c’était en abréger la durée : un petit nombre de coups savamment portés suffisaient pour terminer le combat, de sorte que les adversaires n’avaient pres que jamais le temps de déployer cette énergie, ce courage et cette persévérance enragée, que nous autres Anglais nous appelons pluck en termes techniques, qui souvent ôte la victoire à la science, et donne à un jeu l’intérêt d’une bataille, et appelle sur le brave toutes nos sympathies.

« En garde ! » s’écria Tétraidès en s’approchant de plus en plus près de son adversaire, qui tournait autour de lui beaucoup plus qu’il ne reculait.

Lydon ne répondit que par un regard où son œil prompt et vigilant avait mis tout son dédain ; Tétraidès frappa comme un forgeron sur un étau : Lydon posa un genou à terre : le coup passa sur sa tête ; sa revanche ne fut pas si inoffensive ; il se releva sur-le-champ et lança son ceste en pleine poitrine à son adversaire ; Tttraidès fut étourdi ; la populace fit éclater ses applaudissements.

« Vous n’êtes pas heureux aujourd’hui, dit Lépidus à Claudius ; vous avez perdu un pari, vous allez en perdre un autre.