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LES DERNIERS JOURS

colonnes des salles, les nombreuses statues de marbre, et, au milieu des éclats de rire, il entendit la musique et distingua cette chanson :


CHANSON ÉPICURIENNE.

Ah ! laissez là vos histoires funèbres,
Et vos enfers, par le flamen forgés ;
De vos trois sœurs, les filles des ténèbres,
Nous nous moquons, esprits sans préjugés.

Jupin aurait un bien triste ménage,
Si sa Junon tourmentait ses amours ;
Pourrait-il donc ouïr son bavardage
Et surveiller ce globe dans son cours ?

Qu’il soit béni ton nom, noble Épicure,
Toi qui te ris de ces divinités,
Sage enchanteur, qui de la barque obscure
As su couper les câbles redoutés !

S’il est des dieux dans les voûtes suprêmes,
De nous, mortels, ils ont peu de souci ;
S’il est des dieux, qu’ils s’occupent d’eux-mêmes.
Vivons comme eux, soyons des dieux aussi.

N’auraient-ils pas là-haut quelque vergogne,
S’il leur fallait avoir sur nous les yeux,
Compter les coups que peut boire un ivrogne,
Ou les baisers que donne un amoureux ?

Contentons-nous du sourire des belles,
Du vin, des chants… la terre a mille appas.
Les dieux, amis, nous trouveraient rebelles,
S’ils existaient… mais ils n’existent pas.


Lorsque la piété de Lydon (qui, tout accommodante qu’elle était, ne fut pas médiocrement troublée par ces vers empreints de la philosophie élégante du temps), lorsque, disions-nous, la piété de Lydon se remit du choc qu’elle venait de recevoir, un petit nombre d’individus simplement habillés et appartenant à la classe moyenne passait devant l’endroit où il était assis ; leur entretien était animé ; et ils ne parurent pas faire attention au gladiateur en s’avançant.

« Ô comble d’horreur ! dit un d’eux ; Olynthus nous est arraché ; notre bras droit nous est ravi. Quand le Christ descendra-t-il pour nous protéger ?