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LES DERNIERS JOURS

bien fait et beau garçon ; les femmes aiment les gladiateurs. Si j’avais été esclave, j’aurais pris pour maître d’école un lanista.

— L’eussiez-vous fait ? dit Sosie avec un air dédaigneux. Chacun son goût. »

La foule était arrivée au lieu de sa destination. Mais comme la cellule dans laquelle les bêtes se trouvaient renfermées était extrêmement petite et étroite, la presse des curieux était deux fois plus forte, à mesure qu’on approchait pour les voir, qu’elle n’avait été dans la route. Deux des employés de l’amphithéâtre, placés à l’entrée, diminuèrent sagement le danger, en ne délivrant qu’un petit nombre de billets aux premiers venus, et en n’admettant les survenants que lorsque la curiosité des premiers était satisfaite. Sosie, qui était assez vigoureusement constitué, et qu’un scrupule exagéré de politesse et de savoirvivre ne gênait pas beaucoup, essaya d’arriver parmi les premiers.

Séparé de son compagnon l’ouvrier, Sosie se trouva dans une étroite cellule où la chaleur de l’atmosphère était étouffante, et qu’éclairaient plusieurs torches fumeuses.

Les animaux, gardés ordinairement dans différents vivaria ou différentes cellules, avaient été, pour le plus grand plaisir des spectateurs, rassemblés dans le même lieu, mais séparés les uns des autres par de fortes cages, protégées de barres de fer.

On y voyait ces terribles habitants du désert, qui vont devenir les principaux personnages de notre histoire : le lion, d’une nature plus douce que son compagnon, avait été poussé par la faim jusqu’àla férocité ; il allait et venait dans sa cage d’un air inquiet et farouche, tout contre les barreaux ; ses regards peignaient la rage et la faim ; et, lorsqu’il s’arrêtait par moments pour regarder la foule, les spectateurs se rejetaient en arrière et respiraient deux fois plus vite. Mais le tigre était étendu tranquillement tout de son long dans sa cage, et le mouvement de sa queue, avec laquelle il semblait jouer, ou un sourd bâillement, témoignaient seulement de l’ennui qu’il éprouvait de la prison ou de la vue de la foule qui se pressait devant lui.

« Je n’ai jamais vu de bête plus sauvage que ce lion, même dans l’amphithéâtre de Rome, dit un gigantesque et musculeux garçon qui se trouvait à la droite de Sosie.

— Je me sens humilié quand je regarde ses membres, »