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LES DERNIERS JOURS

récompense, il ne pouvait plus maintenant, sa déposition faite et le peuple excité, sauver l’Athénien. Son ardeur s’augmentant encore de l’énergie de cette lutte, il se livrait aux chances de l’avenir ; il ne doutait plus de triompher d’une femme dont il était si fortement épris.

Pendant que ses esclaves lui ôtaient sa robe, l’idée deNydia lui revint. Il comprit qu’il était nécessaire qu’lone ignorât l’égarement qui s’était emparé de Glaucus, afin qu’elle n’eût aucun motif d’excuser le crime qui lui était imputé ; il était possible que son esclave l’eût informée que Nydia était sous le même toit qu’elle, et qu’elle demandât à la voir. Aussitôt que cette idée traversa son esprit, il dit à l’un de ses affranchis :

« Va, Callias, va trouver Sosie, et dis-lui que sous aucun prétexte il ne permette que l’esclave aveugle, Nydia, quitte sa chambre. Mais attends… Va d’abord trouver les femmes de garde auprès de ma pupille, et recommande-leur de ne pas lui dire que l’esclave aveugle est dans cette demeure. Va vite. »

L’affranchi se hâta d’obéir. Après avoir rempli sa commission près des femmes qui veillaient sur Ione, il chercha le digne Sosie. Il ne le trouva pas dans la petite cellule qui lui servait de cubiculum ; il l’appela à haute voix, et l’entendit répondre de la chambre de Nydia, où il était :

« Ô Callias, est-ce vous que j’entends ? Que les dieux soient bénis ! Ouvrez-moi la porte, je vous en prie. »

Callias ôta la barre de la porte, et vit devant lui la triste figure de Sosie.

« Quoi ! dans la chambre même de la jeune fille, avec elle, Sosie ? Proh pudor ! Comme s’il n’y avait pas assez de fruits mûrs, sans aller cueillir les boutons ?

— Ne parle pas de cette petite sorcière, interrompit Sosie avec impatience ; elle causera ma perte ; et il conta à Callias l’histoire du démon de l’air et la fuite de la Thessalienne.

— Pends-toi donc, malheureux Sosie ; je viens justement de la part d’Arbacès avec un message pour t’annoncer que tu ne dois pas, pour un moment même, la laisser sortir de sa chambre.

Me miserum ! s’écria l’esclave. Que puis-je faire ? Elle a eu le temps de visiter la moitié de Pompéi. Mais demain j’essayerai de la rattraper dans ses vieux gîtes. Garde-moi seulement le secret, mon cher Callias.

— Je ferai, par amitié pour toi, tout ce qui pourra se concilier avec ma propre sûreté. Mais es-tu sûr qu’elle ait quitté la maison ? Elle peut y être encore cachée.