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LES DERNIERS JOURS

de délicieuses figues, de fines herbes couvertes de neige, des anchois et des œufs, étaient rangées de petites coupes remplies d’un vin mélangé de miel. À mesure qu’on plaçait ces choses sur la table, de jeunes esclaves présentaient à chacun des cinq convives (car ils n’étaient pas davantage) des bassins d’argent pleins d’une eau parfumée, et des serviettes brodées de franges de pourpre. Mais l’édile déploya avec ostentation une serviette qu’il avait apportée de chez lui ; ce n’était pas que le linge en fût plus fin. mais la frange était deux fois plus haute que celle des autres ; il s’essuya les doigts en provoquant l’attention, comme un homme qui s’attend à être admiré.

« Vous avez là une splendide mappa, dit Claudius ; d’honneur, la frange en est aussi large qu’une ceinture.

— Une bagatelle, mon cher Claudius, une bagatelle ; on m’a assuré que cette raie est la dernière élégance de Rome, mais Glaucus s’entend mieux que moi à tout cela.

— Que Bacchus nous soit propice ! » dit Glaucus en s’inclinant avec respect devant une magnifique image du dieu placé au centre de la table, au coin de laquelle on avait placé les dieux lares et des salières. Les hôtes répétèrent la prière, et répandant ensuite du vin sur la table, ils firent les libations accoutumées.

Après cela, les convives se penchèrent sur leurs lits, et le repas commença.

« Que cette coupe soit la dernière que je porte à mes lèvres, s’écria le jeune Salluste, pendant que la table, débarrassée de ses premiers stimulants, était garnie de mets plus susbtantids, et que les esclaves remplissaient jusqu’au bord le cyathusqu’il tenait à la main, que cette coupe soit la dernière, si ce n’est pas le meilleur vin que j’aie bu à Pompéi !

— Qu’on apporte l’amphore, dit Glaucus ; et qu’on lise la date et la provenance de ce vin. »

Un esclave s’empressa d’informer la société que, d’après l’étiquette attachée au bouchon, le vin était originaire de Chio, et qu’il comptait cinquante années d’âge.

« Comme la neige l’a rafraîchi délicieusement ! dit Pansa ; il a juste le degré qu’il lui faut.

— Cette neige, reprit Salluste, est pour le vin comme pour l’homme l’expérience, qui, en modérant la fougue de ses plaisirs, les rend deux fois plus agréables.

— Elle produit l’effet d’un non dans la bouche d’une femme,