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LES DERNIERS JOURS

— Sur ma parole, jeune aveugle, je ne connais rien à la loi… Il en peut être autrement que je ne t’ai dit. Mais Arbacès l’accuse, et le peuple demande une victime pour l’arène… Calme-toi : qu’est-ce que le sort du Grec peut avoir de commun avec le tien ?

— N’importe, n’importe ! Il a été bon pour moi… Tu ne sais pas alors ce qu’on fera de lui ?… Arbacès, son accusateur ! ô destin ! Le peuple… le peuple qui peut le voir… ne saurait être cruel pour lui… Mais l’amour ne lui a-t-il pas été déjà fatal ?. »

Elle laissa retomber sa tête sur son sein ; elle garda le silence ; des larmes inondèrent ses yeux, et tous les efforts de l’esclave ne purent la consoler, ni la distraire de sa profonde rêverie.

Lorque les soins de ses fonctions forcèrent l’esclave à la quitter, Nydia recueillit ses pensées. Arbacès était l’accusateur de Glaucus ; Arbacès l’avait emprisonnée : n’était-ce pas la preuve que sa liberté pouvait être utile à Glaucus ? Oui, elle était évidemment prise dans quelque piège ; elle allait contribuer à la perte de celui qu’elle aimait. Comme elle aspirait à s’échapper ! Par bonheur pour ses souffrances, toute sensation de douleur s’absorba dans le désir de se sauver, et, à mesure qu’elle réfléchit à la possibilité de sa délivrance, elle devint plus calme et plus rêveuse. Elle possédait toute la ruse de son sexe, et ces dispositions s’étaient accrues encore dans l’habitude de l’esclavage. Quel esclavage a jamais été dépourvu d’artifice ? Elle résolut de tromper son gardien ; et, se rappelant tout à coup sa requête à propos de l’art thessalien qu’il lui supposait, elle espéra trouver dans ce prétexte quelque moyen de fuite. Tout le reste du jour, et pendant les longues heures de la nuit, elle médita sur ce sujet ; et le lendemain matin, en conséquence, lorsque Sosie vint la visiter, elle se hâta de faire prendre à la conversation un cours où l’esclave ne paraissait pas mieux demander que de la suivre.

Elle ne se dissimula pas que la seule chance qu’elle eût de s’échapper devait coïncider avec la nuit, et, malgré le chagrin qu’elle éprouva de ce retard, elle sentit qu’il était nécessaire de différer son entreprise jusqu’au soir.

« La nuit, lui dit-elle, est le seul moment où nous puissions déchiffrer les secrets du destin ; c’est alors que tu dois venir me trouver… Mais que désires-tu connaître ?

— Par Pollux ! je voudrais être aussi savant que mon maître ;