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LES DERNIERS JOURS

Titan et ses vautours avides,
Tantale aux impuissants désirs.
Là, Sisyphe roule sa pierre
Au haut de l’éternel rocher ;
Viens donc ! sur la sombre rivière
Déjà t’attend le vieux nocher.

III

C’est là, dans ce pâle royaume,
Qu’il faut descendre, ô cher fantôme ;
Tu deviens sujet de Pluton.
Que notre amitié te protège,
Nous voulons te faire un cortége
Digne de ton rang, de ton nom:
La torche brille, impatiente,
Accours, toi qui conduis le deuil ;
Pluton ne connaît pas l’attente,
La mort t’appelle en son cercueil.


Quand le chant fut terminé, le groupe se sépara en deux, et le corps d’Apœcides, placé sur un lit recouvert d’une tenture de pourpre, sortit de la maison les pieds devant. Le désignateur, ou directeur de la triste cérémonie, accompagné de ses porteurs de torches, vêtus de noir, donna le signal, et la procession s’avança solennellement.

D’abord venaient les musiciens, jouant une marche grave ; les sons mélancoliques et peu élevés des instruments étaient interrompus de temps à autre par les éclats des trompettes funéraires ; les pleureurs gagés suivaient les musiciens en chantant leurs chants funèbres; des voix de femmes étaient mêlées à des voix d’enfants dont l’âge tendre rendait encore plus frappant le contraste de la vie et de la mort, ce qu’on aurait pu comparer à la feuille fraîche et à la feuille flétrie:mais les acteurs, les bouffons et l’archimime (dont l’office était de représenter le défunt), ces assistants des convois ordinaires, avaient-été bannis des funérailles du jeune homme auxquelles se rattachaient de si douloureuses circonstances.

Les prêtres d’Isis apparaissaient ensuite, avec leurs blanches robes, nu-pieds et tenant des gerbes de blé; on portait devant le corps les images du décédé et celles de ses ancêtres athéniens. Derrière la bière, au milieu de ses femmes, s’avançait la seule parente du mort, la tête nue, les cheveux dénoués, la figure plus pâle que le marbre, mais cependant