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LES DERNIERS JOURS

assistants… l’Athénien soutenu, à peu de distance, dans les bras de quelques-uns d’entre eux, et surtout les deux figures imposantes d’Arbacès et du chrétien : voilà le tableau. Arbacès, qui dominait considérablement par la taille tous ceux qui l’environnaient, se tenait les bras croisés, le front sourcilleux, les yeux fixes, la lèvre légèrement recourbée en signe de défi et de dédain ; Olynthus portait, sur son front ridé et fatigué, une majesté plus imposante encore ; ses traits étaient sévères, mais pleins de franchise ; son aspect fier, mais ouvert : la ; tranquillité de tout son être, empreint d’une ineffable bienveillance, inspirait la sympathie et le respect qu’il semblait éprouver pour les autres. Sa main gauche s’était abaissée vers le corps ; sa main droite s’élevait vers le ciel.

Le centurion s’avança de nouveau.

« D’abord, as-tu, Olynthus, ou quel que soit ton nom, quelque autre preuve de l’accusation que tu portes contre Arbacès, que ton vague soupçon ? »

Olynthus garda le silence. L’Égyptien sourit avec mépris.

« Réclames-tu le corps d’un prêtre d’Isis comme appartenant à la secte des Nazaréens ou des chrétiens ?

— Je le fais.

— Jure par le temple, par cette statue de Cybèle, par le sacellum le plus ancien de Pompéi, que le mort avait embrassé votre foi.

— Homme insensé ! Je désavoue vos idoles ; j’abhorre vos temples. Comment puis-je jurer par Cybèle ?

— À bas, à bas l’athée ! à bas ! La terre s’ouvrira pour nous engloutir, si nous souffrons de pareils blasphémateurs dans le bosquet sacré !… à bas !… Mort à cet homme !…

Aux bêtes ! ajouta une voix de femme au milieu de la foule. Nous avons maintenant un morceau pour le lion, un autre pour le tigre.

— Si tu ne crois pas à Cybèle, Nazaréen, reprit le soldat sans s’émouvoir des cris de la foule, auquel de nos dieux crois-tu ?

— À aucun.

— Écoutez-le, écoutez, cria la foule.

— Hommes vains et aveugles, poursuivit le chrétien en élevant la voix !… pouvez-vous croire à des images de bois et de pierre ?… pouvez-vous vous imaginer qu’elles ont des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, des mains pour vous secourir. Cette muette idole, taillée par la main d’un homme,