Page:Lytton - Les derniers jours de Pompéi, 1859.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée
286
LES DERNIERS JOURS

C’était la voix de la jeune fille dont nous avons rapporté la conversation avec Médon.

« C’est vrai, c’est vrai ; quelle chance pour les jeux ! » répétèrent plusieurs voix.

Et toute pensée de miséricorde en faveur de l’accusé sembla s’évanouir. Sa jeunesse, sa beauté, ne le rendaient que plus convenable pour l’arène.

« Apportez quelques planches… ou une litière, s’il y en a une ici près, pour y mettre le mort, dit Arbacès. Un prêtre d’Isis ne saurait être porté à son temple par de vulgaires mains, comme un gladiateur massacré. »

Les assistants étendirent respectueusement le corps d’Apœcides sur le gazon, le visage tourné vers le ciel, et quelques-uns d’entre eux se mirent en quête de quelque moyen de transport, afin que le corps ne fût pas touché par des mains profanes.

En ce moment la foule, violemment écartée par un personnage vigoureux, livra passage à Olynthus, qui se trouva près de l’Égyptien ; mais son premier coup d’œil, plein d’une douleur et d’une horreur inexprimables, s’arrêta sur cette poitrine sanglante et sur ces traits, où se peignait encore l’angoisse d’une mort violente.

« Assassiné ! s’écria-t-il ? Est-ce ton zèle qui t’a conduit là ? Ont-ils découvert ton noble dessein, et ta mort a-t-elle prévenu leur honte ? »

Il tourna la tête, et ses yeux s’arrêtèrent sur la figure solennelle de l’Égyptien.

Pendant qu’il le regardait, vous auriez pu voir sur son visage, et dans le léger tremblement de son corps, la répugnance etl’aversion que le chrétien ressentait pour un être qu’il savait si dangereux et si criminel. C’était le regard de l’oiseau sur le basilic, regard fixe et prolongé. Mais, sortant soudain de cette espèce d’engourdissement qui l’avait saisi, Olynthus étendit le bras vers Arbacès, et dit d’une voix forte et hardie :

« On a assassiné ce jeune homme ! Où est le meurtrier ? Réponds, Égyptien ; car, par le Dieu vivant, je crois que c’est toi. »

Le sombre visage d’Arbacès s’altéra un instant et exprima quelque inquiétude ; mais ce changement, à peine perceptible, fut suivi d’une expression de colère et de mépris ; la foule s’arrêta surprise de la véhémence de l’accusation, et se pressa