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LES DERNIERS JOURS

rappelait l’intention qui avait fait consacrer le bosquet, sa sainteté et sa solennité.

D’un pas furtif et léger, Calénus, se glissant sous l’ombre des arbres, s’approcha de la chapelle, et, repoussant les branches qui se joignaient complètement autour de lui, s’arrangea dans sa cachette ; elle était si bien close, avec le temple devant lui et les arbres derrière, qu’aucun passant ne pouvait l’y découvrir : il aurait fallu savoir qu’il était là. Tout était en apparence solitaire dans le bosquet ; de loin on entendait faiblement résonner les voix joyeuses de quelques convives qui s’en retournaient chez eux, ou bien la musique écoutée par les groupes des promeneurs, qui, dès ce temps-là, comme aujourd’hui dans ces climats, se plaisaient à passer les nuits d’été dans les rues, et à jouir de la fraîcheur de l’air et des douceurs des clairs de lune, après l’éclat trop ardent du jour.

Des hauteurs où le bosquet était situé, on pouvait voir, à travers les intervalles des arbres, la mer vaste et pourprée qui grondait au loin, les blanches maisons de Stabie sur la pente du rivage, et les obscures collines Lectiariennes confondues dans un ciel délicieux ; en ce moment, Arbacès, qui se rendait chez Diomède, montra sa grande figure à l’entrée du bosquet ; et il arriva qu’Apœcides, qui venait rejoindre Olynthus, passa devant lui.

« Hem, Apœcides, dit Arbacès, en reconnaissant le jeune prêtre du premier coup d’œil, lorsque nous nous sommes rencontrés la dernière fois, vous étiez mon ennemi. J’ai désiré depuis vous revoir, car je souhaite que vous restiez toujours mon disciple et mon ami. »

Apœcides tressaillit à la voix de l’Égyptien et, s’arrêtant brusquement, le regarda avec un air de profond mépris et de violente émotion.

« Scélérat et imposteur, s’écria-t-il enfin, tu es donc sorti des étreintes du tombeau ; mais n’espère plus jeter sur moi tes sacrilèges filets… rétiaire. Je suis armé contre toi.

— Paix ! répondit Arbacès à voix basse ; mais l’orgueil si fier chez ce descendant des rois trahit la blessure que lui causaient les épithètes insultantes du jeune prêtre dans le tremblement de ses lèvres, et dans la rougeur subite de son front basané… Paix ! parle plus bas ; tu pourrais être entendu, et, si d’autres oreilles que les miennes avaient surpris tes paroles…

— Me menaces-tu ? Ah ! je voudrais que la ville entière pût m’entendre…