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LES DERNIERS JOURS

donner, toi, car tes ancêtres étaient les frères des miens ; ah ! l’on dit que cette terre est belle, que ces climats sont purs ; mais je veux t’emmener avec moi… Oh ! noirevision, pourquoi jeter ton image entre elle et moi ?… La mort est empreinte, calme et terrible, sur ton front… J’aperçois sur ta lèvre un sourire qui tue… Ton nom est Orcus, mais sur terre les hommes t’appellent Arbacès… tu vois ; je te connais… fuis… ombre fatale, tes enchantements ne te serviront à rien.

— Glaucus, Glaucus ! murmura Nydia, en cessant de le retenir et en tombant sans connaissance sur le pavé, oppressée par le remords, l’épouvante et la douleur.

— Qui m’appelle, s’écria-t-il ? Ione, est-ce toi ? ils l’ont emportée. sauvons-la. Où est mon style ?… ah ! je l’ai… Ione, je viens à ton secours, je viens, je viens… »

À ces mots l’Athénien franchit le portique d’un bond, traversa la maison, et sortit d’un pas rapide et chancelant, en se parlant à lui-même, le long des rues éclairées par les étoiles. La funeste potion brûlait comme du feu dans ses veines, car ses effets s’augmentaient encore de la disposition où le banquet avait mis ses esprits. Accoutumés aux excès qui suivaient les repas nocturnes, les citoyens souriaient, et se rangeaient pour le laisser passer, en se faisant des signes d’intelligence ; ils s’imaginaient que Glaucus ressentait l’influence de Bacchus, fort honoré à Pompéi ; mais ceux qui attachèrent deux fois les yeux sur son visage tressaillirent d’un effroi sans nom, et le sourire quitta leurs lèvres. Il parcourut les rues les plus populeuses ; il se dirigeait instinctivement vers la maison d’Ione, lorsque, arrivé à un quartier plus solitaire, il entra dans un bosquet de Cybèle, où il se trouva tout à coup en présence d’un étrange spectacle.