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LES DERNIERS JOURS

rire. Il battit des mains, il bondit, il avait l’air d’une pythonisse inspirée. Ce transport singulier cessa presque aussitôt, mais en partie seulement… Son sang courait rapidement dans ses veines, s’élançant aveclavivacité d’un ruisseau qui a rompu un obstacle et qui se précipite vers l’Océan. Son oreille en saisissait le murmure, il le sentait monter à son front ; il sentait les veines de ses tempes s’étendre et se gonfler, comme si elles ne pouvaient plus contenir cette marée impétueuse et croissante : alors une demi-obscurité se répandit sur ses yeux ; il apercevait au travers de cette ombre les murs opposés, dont les figures lui paraissaient s’animer et marcher ainsi que des fantômes. Ce qu’il y avait de plus étrange, c’est qu’il ne souffrait plus ; la nouveauté de ses sensations avait quelque chose d’heureux et de brillant ; une jeunesse nouvelle paraissait lui avoir infusé sa vigueur ; il était tout près de la folie, et il n’en avait pas conscience.

Nydia n’avait pas répondu à sa première question ; elle n’était pas en état de répondre. L’inconcevable éclat de rire de Glaucus l’avait tirée de ses incertitudes passionnées ; elle ne pouvait voir l’altération de ses traits ; elle ne pouvait remarquer ses pas chancelants, ses allées et venues, dont il ne se doutait pas lui-même ; mais elle entendit les mots interrompus, incohérents, insensés, qui sortirent de ses lèvres. Elle futterrifiéeet effrayée ; elle courut à lui, le cherchant avec ses bras, jusqu’à ce qu’elle eut rencontré ses genoux, et, tombant à terre, elle les embrassa en pleurant d’émotion et d’effroi.

« Oh ! parle-moi, parle-moi, dit-elle ; tu ne me hais pas : parle ! parle !…

— Par la déesse de la beauté, c’est une île magnifique que cette île de Cypre ! on y remplit nos veines devin à la place dusang. Ah ! voilà qu’on ouvre celles d’un faune là-bas, pour nous faire voir comme il bouillonne et brûle. Viens ici, vieux dieu de lajoie. Tu es monté sur un bouc… Ah ! comme il ales crins soyeux ! Il vaut tous les coursiersparthes. Mais, un mot ! Ton vin est trop fort pour nous autres mortels. Oh ! que tout cela est beau ! Les rameaux sont en repos. Les vertes vagues de la forêt ont pris le Zéphyre et l’ont noyé. Pas un souffle ne remue les feuilles, et je vois les songes endormis, les ailes ployées. sous l’ormeau immobile ; et, plus loin, jevois une onde bleue étinceler sous les flammes du midi silencieux ; une fontaine. une fontaine jaillit dans les airs. Ah ! fontaine tu ne saurais éteindre les rayons de mon soleil grec, quoique