Page:Lytton - Les derniers jours de Pompéi, 1859.djvu/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
LES DERNIERS JOURS

le talent, une illustre origine, un cœur de feu, une âme poétique ; mais il lui avait refusé l’héritage de la liberté. Il était né à Athènes, sujet de Rome. De bonne heure, maître d’une fortune considérable, Glaucus avait cédé au goût des voyages, si naturel à la jeunesse, et s’était enivré à la coupe des plaisirs, au milieu du luxe et des pompes de la cour impériale.

C’était un Alcibiade sans ambition. Il était devenu ce que devient aisément un homme doué d’imagination, ayant de la fortune et des talents, lorsqu’il est privé de l’inspiration de la gloire. Sa maison était à Rome le rendez-vous des voluptueux, mais aussi de tous les amis des arts ; et les sculpteurs de la Grèce prenaient plaisir à montrer leur science en décorant les portiques et l’Exedra d’un Athénien. Sa demeure à Pompéi… Hélas ! les couleurs en sont fanées maintenant, les murailles ont perdu leurs peintures ; sa beauté, la grâce et le fini de ses ornements, tout cela n’est plus. Cependant, lorsqu’elle reparut au jour, quels éloges et quelle admiration excitèrent ses décorations délicates et brillantes, ses tableaux, ses mosaïques ! Passionné pour la poésie et pour le drame, qui rappelaient à Glaucus le génie et l’héroïsme de sa race, il avait fait orner sa maison des principales scènes d’Eschyle et d’Homère. Les antiquaires, qui transforment le goût en métier, ont fait un auteur du Mécène ; et, quoique leur erreur ait été reconnue depuis, leur langage a continué de donner, comme on l’a fait tout d’abord, à la maison exhumée de l’Athénien Glaucus, le nom de la Maison du poëte dramatique.

Avant de la décrire, il convient de donner aux lecteurs une idée générale des maisons de Pompéi, qu’il trouvera très-ressemblantes en général aux plans de Vitruve, mais avec ces différences de caprices et de goût dans le détail, qui, bien que naturelles à l’homme, ont de tout temps embarrassé les antiquaires. Nous tâcherons de faire cette description aussi clairement que possible et sans pédanterie.

Vous entrez habituellement, par un petit passage appelé vestibulum, dans une salle ornée ou non de colonnes, la plupart du temps n’en ayant pas. Aux trois côtés de cette salle se trouvent des portes communiquant avec plusieurs chambres à coucher, et parmi ces chambres celle du portier. Les meilleures sont ordinairement destinées aux hôtes. À l’extrémité de la salle, et des deux côtés à droite et à gauche, si la maison est vaste, on voit deux petites retraites, plutôt que des