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LES DERNIERS JOURS

asseyez-vous malgré cela auprès du feu… sans autre cérémonie.

» Le langage dans lequel s’exprima la vieille femme était un latin étrange et barbare, entremêlé de mots d’un plus rude et plus ancien dialecte. Elle ne se leva pas de son siège, mais elle les regarda attentivement, pendant queGlaucus débarrassait Ione de son manteau et la faisait asseoir sur une poutre, le seul siège qu’il trouvât à sa portée ; il se mit ensuite à rallumer avec son haleine les restes du feu à moitié éteint. L’esclave, encouragée par la hardiesse de ses maîtres, se dépouilla elle-même de sa longue palla et se glissa timidement de l’autre côté du foyer.

« Nous vous gênons peut-étre ? » dit Ione d’une voix argentine, pour se concilier la Vieille.

La sorcière ne répondit pas. Elle ressemblait à une femme réveillée un moment de la tombe, mais qui avait repris après son éternel sommeil.

« Dites-moi, s’écria-t-elle tout à coup après un long silence, êtes-vous frère et sœur ?

— Non, répondit lone en rougissant.

— Êtes-vous mariés ?

— Pas encore, reprit Glaucus.

— Ha ! des amants… ha ! ha ! ha ! » et la sorcière fit retentir la caverne d’un éclat de rire prolongé.

Le cœur d’Ione se glaça à cet étrange accès de gaieté. Glaucus se hâta de murmurer quelques paroles auxquelles il attribuait le pouvoir de conjurer un mauvais présage, et l’esclave, dans son coin, devint aussi pâle que la sorcière elle-même.

« Pourquoi ris-tu ainsi, vieille femme ? dit Glaucus avec rudesse, après qu’il eut achevé son invocation.

— Ai-je ri ? demanda la sorcière d’un air distrait.

— Elle est en enfance, reprit Glaucus, et tout en parlant il rencontra les yeux de la sorcière fixés sur les siens avec un regard plein de malice et de vivacité.

— Tu mens, dit-elle brusquement.

— Tu es une hôtesse bien peu aimable, dit Glaucus.

— Oh ! cher Glaucus, dit lone, ne l’irrite pas.

— Je veux te dire pourquoi j’ai ri lorsque j’ai appris que vous n’étiez que desamants, dit la vieille femme. C’étaitparce qu’il y a du plaisir pour les personnes vieilles et flétries à voir de jeunes amants comme vous, et à savoir en même temps