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DE POMPÉI

qui glacèrent le plus le sang de ceux qui y jetèrent les yeux. Ce fut la figure de l’hôtesse. Devant le feu, la lumière réfléchie sur ses traits, se tenait assise une femme très-âgée. On ne rencontre peut-être dans aucun pays autant de vieilles femmes affreuses qu’en Italie. Dans aucun pays la beauté, en se retirant, ne laisse une forme plus révoltante et plus hideuse. Mais la vieille femme qui se présentait aux amants n’offrait pas ce dernier degré de la laideur humaine ; on reconnaissait au contraire en elle les restes de traits réguliers, nobles et aquilins ; elle avait un regard qui exerçait encore une sorte de fascination. On eût dit le regard d’un cadavre, regard froid et terne ; ses lèvres bleues et rentrées, ses cheveux d’un gris pâle, plats et sans lustre, sa peau livide, verte, inanimée, semblaient avoir déjà pris les couleurs etles nuances de la tombe.

« C’est une morte, dit Glaucus.

— Non… elle se meut… c’est un fantôme, ou une larve, murmura Ione en se pressant contre la poitrine de l’Athénien.

— Oh ! fuyons, fuyons, s’écria l’esclave, c’est la magicienne du Vésuve.

— Qui êtes-vous ? dit une voix creuse et pareille à celle d’une ombre, et que faites-vous ici ? »

Cette voix lugubre et sépulcrale, enharmonieavecla figure de celle qui parlait, et qui paraissait plutôt la voix de quelque malheureuse créature errant sur les bords du Styx, que celle d’un être mortel, aurait fait fuir Ione au milieu des plus terribles rigueurs de l’orage ; mais Glaucus, quoiqu’il ne fût pas sans frayeur lui-même, l’entraîna dans la caverne.

« Nous sommes des voyageurs de la cité voisine ; égarés sur la montagne, dit-il, nous avons été attirés par cette flamme, et nous demandons un abri à votre foyer. »

Pendant qu’il parlait, le renard se leva et s’approcha d’eux, en montrant dans toute leur rangée ses dents blanches, et en glapissant d’une façon menaçante.

« Paix, esclave ! » dit la sorcière ; et au son de sa voix l’animal s’arrêta et se recoucha, couvrant son museau de sa queue, et tenant seulement ses yeux fixés d’un air plein de vigilance sur les étrangers qui étaient venus troubler son repos. « Approchez-vous du feu, si vous voulez, dit la vieille à Glaucus et à ses compagnons. Je ne reçois volontiers ici aucune créature vivante, à l’exception du hibou, du renard, du crapaud et de la vipère… Je ne puis donc vous faire bon accueil… Mais