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DE POMPÉI

de semblables talismans ne sont pas au nombre des secrets que mes longues veilles ont acquis.

— Alors, illustre Arbacès, pardonne-moi et reçois mes adieux.

— Arrête, s’écria Arbacès, qui, malgré sa passion pour Ione, ne demeurait pas insensible à la beauté de sa visiteuse, et qui, dans un meilleur état que celui où il se trouvait, aurait peut-être essayé de consoler la noble Julia par d’autres moyens que ceux d’une science surnaturelle…

— Arrête, reprit-il ; quoique j’aie laissé, je l’avoue, l’art de la magie, des philtres et des breuvages à ceux qui en font métier, je ne suis pas cependant si indifférent à la beauté, que je n’aie usé de cet art pour mon propre compte, dans ma jeunesse… Je puis te donner des renseignements utiles, du moins, si tu me parles avec franchise. Si j’en crois ta toilette, tu n’es pas encore mariée.

— Non, dit Julia.

— Et peut-être, n’étant pas favorisée de la fortune, tu veux conquérir un riche époux.

— Je suis plus riche que celui qui me dédaigne.

— C’est étrange, très-étrange ! tu aimes donc bien celui qui ne t’aime pas ?

— Je ne sais si je l’aime, répondit Julia avec hauteur, mais je sais que je veux triompher d’une rivale. Je voudrais voir à mes pieds celui qui m’a refusé son hommage… Je voudrais voir celle qu’il m’a préférée, méprisée à son tour.

— Ambition naturelle et digne d’une femme ! continua l’Egyptien d’un ton trop grave pour être ironique ; un mot encore, jeune fille. Peux-tu me confier le nom de celui que tu aimes ; est-il possible que ce soit un Pompéien ? Un Pompéien, s’il était aveugle à ta beauté, le serait-il à ta richesse ?

— Il est d’Athènes, répondit Julia en baissant les yeux.

— Ah ! s’écria l’Égyptien impétueusement, et une vive rougeur colora ses joues, il n’y a qu’un Athénien jeune et noble à Pompéi… Parlerais-tu de Glaucus ?

— Ne me trahis pas, c’est lui en effet. »

L’Égyptien s’affaissa sur son siége, le regard attaché sur le visage à demi détourné de la fille du marchand, en se demandant à lui-même si cette conférence, qu’il avait jusqu’alors régardée comme indifférente, en s’amusant de la crédulité de sa visiteuse, ne pouvait pas profiter à sa vengeance.

« Je vois que tu ne peux m’être d’aucun secours, reprit Ju-