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LES DERNIERS JOURS

elle remarqua aussi avec un certain effroi les inscriptions hiéroglyphiques tracées sur les murs, les figures des mystérieuses idoles qui paraissaient la contempler de tous les coins de l’appartement ; le trépied à peu de distance ; et par-dessus tout, elle observa l’air grave et imposant d’Arbacès. Une longue robe blanche couvrait à moitié comme un voile ses cheveux noirs et tombait jusqu’à ses pieds ; sa présente pâleur rendait encore sa physionomie plus expressive ; son œil noir et pénétrant semblait percer l’abri du voile de Julia, et explorer les secrets de l’âme vaine et si peu féminine de sa visiteuse.

« Quel motif, dit-il d’une voix lente et grave, t’amène, ô jeune fille, dans la maison d’un fils de l’Orient ?

— Sa réputation, dit Julia.

— En quoi ? reprit-il avec un étrange et léger sourire.

— Peux-tu le demander, sage Arbacès ? Ta science n’est-elle pas le sujet de toutes les conversations de Pompéi ?

— J’ai acquis en effet quelques connaissances, répondit Arbacès ; mais comment ces sérieux et stériles secrets peuvent-ils être agréables à l’oreille de la beauté ?

— Hélas ! dit Julia, un peu encouragée par ce ton d’adulation auquel elle était habituée, la douleur ne s’adresse-t —elle pas à la sagesse pour être consolée ? et les personnes qui aiment sans espoir ne sont-elles pas les victimes choisies de la douleur ?

— Ah ! s’écria Arbacès, un amour sans espoir ne saurait être le lot d’une si belle personne, dont les attraits se révèlent à travers le voile même qui les couvre ; relève, jeune fille, relève ce voile ; laisse-moi voir si ton visage est en harmonie avec la grâce de ton corps. »

Julia, qui ne demandait pas mieux que de montrer ses charmes, et qui pensait peut-être intéresser ainsi davantage l’Égyptien à son sort, leva son voile après une courte hésitation, et révéla une beauté à laquelle le regard de l’Égyptien n’aurait pu reprocher qu’un peu trop d’art.

« Tu viens pour m’entretenir d’un amour malheureux, dit-il ; tourne ton visage vers celui que tu aimes ; je ne saurais te conseiller un meilleur charme que celui-là !

— Oh ! trêve à ces flatteries, dit Julia ; c’est un vrai charme que je viens demander à ta science, un charme qui fasse aimer.

— Belle étrangère, répliqua Arbacès avec un peu d’ironie,