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DE POMPÉI

projets, humilié mon audace, au moment ou mon fer allait se plonger dans son sang infâme, ne m’échappera pas une seconde fois. Mais par quels moyens me venger ? réfléchissons-y bien. Ô Até, si tu es réellement une déesse, remplis-moi de tes plus saintes inspirations. L’Égyptien tomba dans une profonde rêverie qui ne paraissait pas lui présenter une idée claire et satisfaisante. Il changeait continuellement de position, à mesure qu’il repoussait l’un après l’autre tous les plans qui s’offraient à son esprit ; il se frappa plusieurs fois la poitrine et gémit, plein du désir de la vengeance, mais avec le sentiment de son impuissance pour l’accomplir. Tandis qu’il demeurait ainsi absorbé, un jeune esclave entra timidement dans sa chambre.

Une femme, évidemment d’un rang élevé, Comme l’indiquaient sa toilette et le costume de l’esclave qui l’accompagnait, attendait en bas, et demandait audience à Arbacès.

Une femme !… son cœur battit avec vitesse.

« Est-elle jeune, demanda-t-il ?

— Sa figure est cachée par un voile, mais sa taille élancée, quoique arrondie, annonce la jeunesse.

— Qu’on la fasse entrer, » dit l’Egyptien ; un instant son cœur ému d’un vain espoir se flatta que ce pourrait être Ione.

Le premier regard jeté sur la personne qui entrait dans son appartement suffit pour le tirer de son erreur. Elle était, à la vérité, de la même grandeur qu’lone et probablement du même âge, bien faite et pleine d’appas : mais où était cette grâce ineffable et attrayante qui accompagnait chaque mouvement de l’incomparable Napolitaine ; cette toilette chaste et décente, si simple dans son arrangement ; cette démarche si digne et si réservée ; la majesté de la femme et toute sa modestie ?

« Pardonnez moi si je me lève avec peine, dit Arbacès en regardant l’étrangère ; je sors à peine d’une cruelle souffrance.

— Ne faites aucun effort, ô grand Égyptien, répondit Julia, cherchant à déguiser sous les dehors de la flatterie la crainte qu’elle avait éprouvée ; pardonnez à une femme malheureuse, qui vient demander des consolations à votre sagesse.

— Approchez-vous, belle étrangère, reprit Arbacès, et parlez sans crainte et sans réserve. »

Julia s’assit auprès de l’Égyptien, et jeta des regards de surprise autour d’une chambre dont le luxe exquis et coûteux surpassait même celui qui brillait dans la maison de son père ;