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DE POMPÉI

étaient, au contraire, le résultat d’un art laborieux. Dans leurs portiques et dans leurs jardins, ils jouissaient du soleil autant que cela leur plaisait ; dans l’intérieur de leurs maisons, ils cherchaient plutôt l’ombre et la fraîcheur.

L’appartement de Julia, dans cette saison, était retiré dans la partie la plus basse de la maison, immédiatement au-dessous des salles principales, et donnait sur le jardin, aveclequel il était de plain-pied. Une large porte vitrée n’admettait que les rayons du soleil levant ; cependant l’œil de Julia était assez habitué à l’obscurité pour apercevoir exactement les couleurs qui lui seyaient le mieux, et la nuance de rouge qui devait donner le plus d’éclat à ses yeux noirs et le plus de vivacité à ses joues.

Sur la table devant laquelle elle était assise, se voyait un petit miroir circulaire en acier poli ; autour, se trouvaient rangés, dansunordreprécis, les cosmétiques et les onguents, les parfums et les fards, les bijoux et les peignes, les rubans et les épingles d’or, qui étaient destinés à ajouter aux attraits naturels de la beauté, l’assistance de l’art et les capricieuses coquetteries dela mode. À travers la demi-obscurité de la chambre brillaient les couleurs vives et variées des peintures de la muraille, avec tout l’éclat des fresques pompéiennes. Devant la table de toilette, et sous les pieds de Julia, s’étendait un tapis sorti des métiers de l’Orient. À portée de la main, une autre table était chargée d’une aiguière et d’un bassin ; il y avait aussi sur cette table une lampe éteinte, du plus exquis travail, sur laquelle l’artiste avait représenté un Cupidon reposant sous des branches de myrte ; et un petit rouleau de papyrus contenant les plus douces élégies de Tibulle. Un rideau magnifiquement brodé de fleurs d’or servait, de portière à l’entrée du Cubiculum. Tel était le cabinet de toilette d’une beauté à la mode, il y a dix-huit siècles.

La belle Julia s’appuyait indolemment sur son siége, pendant que l’ornatrix (la coiffeuse) élevait lentement les unes au-dessus des autres une foule de petites boucles, dont toutes n’appartenaient pas à Julia ; elle entremêlait les fausses et les vraies avec art, et portait si haut son édifice, qu’il semblait placer la tête plutôt au centre qu’au sommet du corps humain.

Sa tunique, de couleur d’ambre foncée, qui convenait bien à ses noirs cheveux et à son teint un peu brun, descendait avec d’amples plis jusqu’à ses pieds, lesquels étaientrenfermés dans des pantoufles attachées autour de sa jambe gracieuse