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LES DERNIERS JOURS

pendant que Pilate hésitait, le peuple demandait à grands cris que le Christ fût attaché à la croix. Mais nous ne vous lions point à notre sûreté. Non, livrez-nous à la foule ; accusez, calomniez, décriez-nous, si vous le voulez ; nous sommes au-dessus de la mort ; nous irons avec joie à la rencontre de la dent du lion ou des instruments de la torture ; nous nous élevons au-dessus de l’obscurité de la tombe, et ce qui pour un criminel est la mort, est l’éternité pour un chrétien. »

Un murmure sourd d’approbation courut dans l’assemblée.

« Tu viens parmi nous en observateur ; puisses-tu nous demeurer converti ! Notre religion, tu la vois ; notre croix est notre seule image ; ce livre, les mystères de notre Cérès et de notre Éleusis ! Notre moralité, elle est dans notre vie ! Nous avons tous été pécheurs : qui peut maintenant nous accuser d’un crime ? Le baptême a enlevé les taches du passé. Ne pense pas que ceci soit de nous, mais de Dieu ! Approche, Médon, dit-il en s’adressant au vieil esclave qui avait parlé le troisième pour l’admission d’Apœcides : tu es le seul homme parmi nous qui ne jouisse pas de la liberté ; mais, dans le ciel, le dernier sera le premier, il en est de même parmi nous. Déroule ton manuscrit et explique la loi. »

Il serait inutile pour nous de suivre la lecture de Médon et les commentaires de l’assemblée. Ces doctrines, alors étranges et nouvelles, nous sont familières. Dix-huit siècles nous ont laissé peu de choses à apprendre sur tous les enseignements de l’Écriture et sur la vie du Christ. Il y aurait également peu d’intérêt pour nous dans les doutes qui pouvaient assaillir l’esprit du prêtre païen, et dans les réponses d’hommes grossiers, rudes et simples, dont toute l’instruction consistait à savoir qu’ils étaient plus grands qu’ils ne paraissaient l’être.

Une chose toucha profondément le Napolitain : lorsque la lecture fut terminée, on entendit un léger coup frappé à la porte ; le mot d’ordre donné, et la réponse faite, la porte s’ouvrit de nouveau, et deux enfants, dont l’aîné paraissait avoir sept ans, entrèrent timidement : c’étaient les enfants du maître de la maison, de ce sombre et vigoureux Syrien, dont la jeunesse s’était passée dans le pillage et dans le sang. Le plus ancien de l’assemblée (c’était le vieil esclave) leur tendit les bras. Ils s’y réfugièrent ; ils s’attachèrent à son sein : il les caressa en souriant. Alors ces hommes hardis et fervents, nourris dans les vicissitudes, battus par les vents les plus rudes de la vie, hommes d’un courage de fer, et qui ne connais-