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LES DERNIERS JOURS

bons mots, faiseurs de pointes, comme on en voit à Westminster. Au centre de l’espace, des piédestaux supportaient diverses statues, dont la plus remarquable était celle de Cicéron, d’un aspect imposant. Autour de la cour s’élevait une colonnade régulière et symétrique d’architecture dorique, où plusieurs personnes, appelées dans ce lieu par leurs affaires, prenaient le léger repas qui forme le déjeuner d’un Italien, en parlant avec animation du tremblement de terre de la nuit précédente, et en trempant des morceaux de pain dans leur vin mêlé d’eau.

On apercevait aussi dans l’espace ouvert diverses espèces de marchands exerçant leur commerce : l’un présentait des rubans à une belle dame de la campagne ; l’autre vantait à un robuste fermier l’excellence de ses chaussures ; un troisième, une espèce de restaurateur en plein vent, tel qu’il s’en trouve encore dans les villes d’Italie, fournissait à plus d’une bouche affamée des mets sortis tout chauds de son petit fourneau ambulant ; à quelques pas, comme pour caractériser le mélange d’intelligence et de confusion de ces temps, un maître d’école expliquait à ses disciples embarrassés les éléments de la grammaire latine[1]. Une galerie placée au-dessus du portique, à laquelle on montait par un escalier de bois, était aussi remplie d’une certaine foule ; mais, comme la principale affaire du lieuse traitait là, les groupes, en cet endroit, avaient un air plus tranquille et plus sérieux.

De temps à autre, la foule d’en bas s’ouvrait pour laisser passer respectueusement quelque sénateur qui se rendait au temple de Jupiter (situé sur l’un des côtés du forum, et lieu de réunion des sénateurs). Ce haut personnage saluait avec une orgueilleuse condescendance ceux de ses amis ou de ses clients qu’il distinguait dans les groupes. Au milieu des habits pleins d’elégance des personnes du premier rang, on remarquait les rudes vêtements des paysans voisins qui allaient aux greniers publics. Près du temple, on avait devant soi l’arc de triomphe, et la longue rue qui s’étendait au delà toute remplie d’habitants : de l’une des niches de l’arc jaillissait une fontaine, dont les eaux étincelaient aux rayons du soleil ; s’élevant au-dessus de la corniche, la statue équestre en bronze

  1. Il y a dans le musée de Naples une peinture peu connue, qui représente un côté du forum de Pompéi, tel qu’il existait, et à laquelle j’ai eu recours pour cette description.