Page:Lyriques grecs - traduction Falconnet.djvu/358

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourquoi, pareil à l’avide sangsue, t’attacher à mon corps, pourquoi dévorer ma vie ?

Oiseau sacré, vers moi rappelle mon volage amant.

Je broie ce vert lézard, breuvage funeste que je te présenterai demain. Thestylis, prends ces philtres, inonde le seuil de sa maison, ce seuil où est attaché mon cœur, et le perfide ne s’en soucie pas ! Crache et dis: « Je jette aux vents les cendres de Delphis. »

Oiseau sacré, vers moi rappelle mon volage amant.

Je suis seule... Par où commencerai-je à dire mon déplorable amour ? Qui dois-je en accuser ? Anaxo, lille d’Eubolus, allait au bois de Diane , portant sur sa tête la corbeille sacrée. Dans ce bois furent amenées de toutes parts des bêtes féroces pour orner la fête; parmi elles se trouvait une lionne.

Reine des nuits, apprends quel fut mon amour.

Theucarila, ma nourrice et ma voisine , née parmi les Thraces, et qui est maintenant dans l’heureux Élisée, me pressa, me conjura d’aller voir cette pompe solennelle ; et moi, pauvre jeune fille , je la suivis vêtue de beaux habits de lin et couverte du riche manteau de Cléarista.

Reine des nuits, apprends quel fut mon amour.

A moitié du chemin, près de la cabane de Lycon, je vis Delphis marchant avec Eudamippe. Un duvet fin et doré colorait leurs joues, et leur poitrine étincelait d’un éclat plus pur que le tien , ô Lune ! Ils revenaient du gymnase et de leurs nobles exercices.

Reine des nuits, apprends quel fut mon amour.

A sa vue, infortunée que je suis ! je devins toute en feu , ma raison s’égara, mon front pâlit, la fête disparut à mns yeux ; j’ignore quelle main alors me ramena chez moi. En proie à la fièvre brûlante, dix jours et dix nuits je fus attachée sur un lit de douleur.

Reine des nuits, apprends quel fut mon amour.

Mon corps prit la triste couleur du thopsos ; ma tête se dégarnissait de ses cheveux, et mes os n’étaient couverts