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170 PINDARE. d`etre trop au-deœus ou trop au-dessous de son sujet; mais Pin- dare s`ctait pénétré tl’un sentiment qui ne connaissait aucun de ces petits obstacles, et qui portait sa vue au-delà des limites où la nôtre se renferme. Son génie vigoureux et independant ne s’annonce que par des mouvements irréguliers, tiers et impétueux. Les dieux sont—ils l’objet de ses chants, il s’élève, comme un aigle, jusqu`au pied dc leurs trônes : si ce sont des hommes, il se précipite dans la lice, comme un coursier fougueux : dans les cieux, il roule, pour ainsi dire, un torrent d’images sublimes, de métaphores hardies, de pensées fortes et de maximes étince- lantes de lumière *. Pourquoi voit-on quelquefois ce torrent franchir ses bornes, rentrer dans son lit, en sortir avec plus de fureur, y revenir pour achever paisiblement sa carrière? Cest qu’alors, semblable à un llon qui s`élanceàplusieurs reprises dans des sentiers détournés, et ne se repose qu’après avoir saisi sa proie, Pindare poursuit avec · acharnement un objet qui parait et disparait à ses regards. ll court, il vole sur les traces de la gloire; il est tourmenté du bœ soin de la montrer à sa nation. Quand elle n’éclate pasasse: dans les vainqueurs qu'll célèbre, il va la chercher dans leurs aïeux, dans leur patrie, dans les instituteurs de jeux, partout où il en reluit des rayons, qu'il a le secret de joindre à ceux dont ll cou- ronne ses héros. A leur aspect, ll tombe dans un delire que rien ne peut arreter; ll assimile leur éclat à celul de l‘astre du jour*; il place l’homme qui les a recueillis au Mte du bonheur *; sl cet homme joint les richesses à la beauté, il le place sur le trône même de Jupiter ‘, et pour le prémunir contre Porgucil , il se hâte de lui rappeler que, revetu d'un corps mortel, la terre sera bien- tôt son dernier vetement ‘. ' Un langage si extraordinaire était conforme a l‘esprlt du siè- cle. Les victoires que les Grecs venaient de remporter sur les Perses les avaient convaincus de nouveau que rien n’exalte plus , _ lcs ames que les témoignages éclatants de l‘cstime publique.

  • ltornt., lib. l\', od. 11.- Quintil., instit., Iih. X, c. t, p. GSI. — Discours

prèlimiu. de la lraduct.'dc·S pylh. - Mémoires dc |'Acad. des Ilcll. Lett. , 1. tt, p. at; t. v, p. 95; t. Xxxlt, p. 451. ' Ntul , 0ljmp· I, \'· 1. · · td., ibid., v. tat. . ‘ ld., lsthm. v, v. tn. ‘ ld., nom. xt, v. 20. ·