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enchaîne les deux sexes créés par la nature ; puisque, malgré les canons et les préjugés, je brûle de me plonger dans ton sein et que tu brûles de m’y recevoir et de pomper le baume de la vie que je te transmets, puisque enfin ce n’est qu’à l’approche de la plus solide union de nos sexes que nous nous écrions : « Tout est au mieux ; il ne manque enfin à notre optimisme que d’être plus durable. » Hélas ! rien ne l’est sur cette terre, qui s’éteint et se reproduit par nos plaisirs.

Mes sens ravis avaient déjà souscrit à ces décisions ; l’idée de mon bien-être me soutenait, et j’avoue que, depuis une année que je recueille les douceurs de la conversation de mon amant et les caresses qu’il me prodigue, j’aurais oublié mes premiers jours si je n’avais eu la précaution de les confier d’avance au papier.

Cet honnête homme, si au-dessus des préjugés vulgaires, a lu le premier cette histoire manuscrite de mon libertinage, il m’a pardonné tous les gros mots dont elle est créée, parce que chacun doit adopter les termes de son pays et se plier aux variétés de l’opinion. Ce n’est encore qu’après les plus vives instances de sa part que je me suis déterminée à transmettre à la postérité le scandale de ma vie.

— Pourquoi, mon ami, lui disais-je, apprendre à de jeunes filles qui me liront la route de la volupté, que la séduction leur apprend assez ?

— Très bien, ma chère, m’a-t-il répondu, les jeunes filles sauront ton alphabet avant de lire ton histoire ; elles auront abusé de leurs appas avant d’être instruites