Page:Lyautey - Du role colonial de l armee, Armand Colin, 1900.djvu/21

Cette page a été validée par deux contributeurs.
est appliquée. L’œuvre est donc sans cesse à recommencer.

J’estime que ce raisonnement part d’une fausse appréciation des conditions de formation et d’établissement des bandes pirates.

En premier lieu, l’expérience du passé démontre qu’on arrive rarement, sinon jamais, à la destruction par la force d’une bande pirate. Dans la chasse à courre que représente la poursuite d’une bande déterminée, tous les avantages restent du côté de l’adversaire avec une évidence telle qu’il est superflu de la détailler ici ; et un résultat toujours partiel ne s’obtient qu’au prix de fatigues, de pertes, de dépenses, qui ne sont certes pas compensées par le succès.

En second lieu, il ne faut pas perdre de vue que le « pirate » est, si je puis m’exprimer ainsi, « une plante qui ne pousse qu’en certains terrains », et que la méthode la plus sûre, c’est de lui rendre le terrain réfractaire.

Il n’y a pas de pirates dans les pays complètement organisés ; en revanche, il y en a, même en Europe, sous d’autres noms, dans les pays tels que la Turquie, la Grèce, l’Italie du Sud, qui n’offrent qu’une voirie incomplète, une organisation administrative rudimentaire, ou une population clairsemée. Si j’ose continuer ma comparaison, je dirai que, lorsqu’il s’agit de mettre en culture une partie d’un terrain envahi par les herbes sauvages, il ne suffit pas d’arracher celles-ci sous peine de recommencer le lendemain, mais qu’il faut, après y avoir passé la