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— Que vous chanterai-je bien, dit Marianna ? Gwerz Ervoanik Al Lintier, si vous voulez ?

— Non, c’est trop triste cela. Marc’harit va nous chanter un beau sône.

Et Marc’harit, après s’être fait un peu prier, comme toutes les jeunes filles, quoiqu’elle brûlât d’envie de faire entendre sa belle voix, chanta le sône suivant :

Sône[1]

À Plounévez j’allai au pardon : — là mon cœur fut brisé, — et si mon corps est revenu à la maison, — il est bien malade aussi, ma chère petite sœur.

Ma chère petite sœur, préparez-moi mon lit ; — Dieu seul sait quand je m’en relèverai : — cherchez-moi aussi un prêtre, — mon pauvre cœur est brisé !

— Mon frère chéri, dites-moi — quel est le mal dont vous êtes atteint ? — Il n’y a pas de mal qui ne puisse se guérir, — avec la grâce et la volonté de Dieu.

— Hélas ! pour avoir trop aimé une fille, — j’ai du mal et de la douleur assez ! — Hélas ! Marguerite Kernitron — est celle qui m’a brisé le cœur !

Dans le pardon quand j’arrivai, — mon Dieu

  1. Da Blounevez ’c’h is d’ar pardon :
    Eno oo rannet ma c’halon,
    Ha ma ’z ê deut ma c’horf d’ar gêr,
    Eo klanv meurbet, ma c’hoarik ker.