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Tout-à-coup, j’entendis soulever le loquet de la porte, puis la porte s’ouvrit et je vis entrer, lentement et sans faire de bruit, une femme que je ne connaissais point. Cette apparition soudaine me surprit d’autant plus que je n’avais entendu aucun bruit dans l’escalier et cependant j’ai l’oreille bonne, Dieu merci. Je pensai d’abord que c’était une servante du château, envoyée chercher quelqu’objet dans la chambre. Mais, sa mise était des plus légères ; elle ne paraissait avoir que sa chemise pour tout vêtement, ce qui me fit croire encore qu’elle ignorait que j’étais là. Cependant, quand je la regardai plus attentivement, je fus bien étonné de ne voir que le buste d’une femme, jusqu’à la ceinture. L’apparition, qui ne semblait pas toucher le plancher, se glisse jusqu’à mon lit, lentement, et toujours silencieuse, quoique j’eusse crié deux ou trois fois : — « Qui va là ? » Je regardais cette tête sans corps, et sa vue me glaçait le sang. Je ne pouvais plus parler, et mes cheveux se dressaient sur ma tête. Mais, la voilà qui entre dans mon lit… et se glisse sous les draps, à mes côtés !… puis elle se penche sur moi, et me souffle au visage, et je sentais son souffle qui soulevait mes cheveux et les faisait voltiger autour de mon front. J’avais une peur terrible ; je ne savais que faire. Ce qui m’inquiétait le plus, c’était que je ne sentais rien, ni quand le fantôme avait paru se glisser sous les draps, ni quand je