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— C’est ce que nous verrons, répondit le seigneur. Et il partit là-dessus.

De retour à son château du Kerouez, il raconta à ses gens que Bilz devait, dans les vingt-quatre heures, enlever sa haquenée blanche de son écurie, sous peine d’être pendu haut et court, et il leur recommanda de bien veiller.

Deux valets d’écurie dirent que Bilz, quelque malin qu’il pût être, n’enlèverait rien du tout de l’écurie, et qu’ils en répondaient sur leur tête.

Les deux valets résolurent de passer la nuit sur pied, et après souper, ils se rendirent à l’écurie, avec un pot de cidre, et des cartes à jouer, afin de ne pas s’endormir. C’était la veille du mardi gras ; il y avait festin de boudins, cette nuit-là, dans une ferme voisine, où leurs bonnes amies devaient se trouver, et cette pensée leur trottait par la tête. Vers les dix heures, quand ils eurent vidé leur pot de cidre, l’un d’eux dit à l’autre :

— Il me semble qu’il n’est pas nécessaire que nous restions ici tous les deux, pendant toute la nuit ; Bilz ne viendra sans doute pas ; et puis, quand bien même il viendrait, un seul de nous suffirait bien pour l’empêcher de rien enlever.

— C’est aussi mon avis, répondit l’autre.

— Eh ! bien, reprit le premier, nous irons l’un après l’autre à la ferme, pour manger des boudins et danser avec nos bonnes amies, car l’on dansera et j’entends même le biniou.