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serait longue à faire, depuis César, et avant, jusqu’à Napoléon Ier. Je me demandais si une croyance pouvait être si généralement répandue, sans qu’il y eût quelque part de vérité. J’étais ébranlé.

Une nuit, je lisais dans mon lit la Somme théologique de saint Thomas. Je faisais des recherches pour un sermon que je devais prêcher le dimanche suivant. J’avais lu fort avant dans la nuit. Je venais de fermer mon livre et d’éteindre ma lumière, et je récapitulais, j’analysais ma lecture et cherchais à coordonner mon discours. Il faisait très-sombre. Tout-à-coup, j’entendis remuer les chaises, au pied de mon lit. Je crus que j’avais enfermé mon chien dans ma chambre, et je l’appelai. Mais, le chien ne vint pas à mon appel ; il n’était pas dans la chambre. Alors, je vis surgir de l’autre extrémité de l’appartement trois personnages, avec de longues robes noires, la tête nue et ressemblant à des prêtres. Ils tenaient chacun à la main une chandelle allumée, et leurs grandes manches, qu’ils tenaient à la hauteur de leurs têtes, m’empêchaient de voir leurs figures. Ils marchaient lentement, à la suite l’un de l’autre, et venaient vers moi. Je m’étais soulevé sur mon coude, et je les regardais venir, tout étonné, les yeux grands ouverts et la bouche aussi, je crois. Quand ils passèrent à raser mon lit, je pris ma chandelle sur ma table de nuit et voulus l’allumer aux leurs. Mais, j’avais beau l’approcher de leurs lumières, elle ne s’allumait pas, et, ce qui