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Finistère a pour auteur un homme d’une trentaine d’années, qui habite Spézot, et que j’estime d’ailleurs beaucoup. Ell a été écrite et répandue, dans une excellente intention patriotique. Mais, on sera renseigné sur sa valeur littéraire, quand j’aurai dit qu’elle a pour titre « Ar Sergent-Major », pour refrain « Vive ar Republic Franc ! » et que tout le reste est à l’avenant. Platitude et médiocrité, telle est, malheureusement, la devise de nos aèdes modernes. C’est pourtant à eux que va le succès. Et nous avons le Barzaz-Breiz, de M. de la Villemarqué ! Nous avons le Bombard-kerné[1], de Prosper Proux ! Nous avons le Bepred-Breizad de M. Luzel ! Nous avons enfin, quoique dans une langue un peu byzantine, l’Annaïc de M. Quellien. Mais voilà : toutes ces belles choses ne sont pas imprimées sur feuilles volantes, et le paysan n’achète pas de livres.

Quant au Léon, l’on n’y chante guère. Toujours vêtu de noir, le Léonard a la dignité grave de son homonyme d’Espagne, je ne sais quelle solennité d’hidalgo. Par son entente des affaires, il est de ce temps-ci ; par ses habitudes morales, il est du moyen âge. C’est à la fois un spéculateur habile et un catholique sombre. Aussi, chez lui,


gare, les plus exquises, « sonn » d’amour qu’il ait jamais entendues. Il est à regretter qu’il n’ait pas cru les devoir donner dans son volume, En tout cas, le fait qu’il cite est exceptionnel. Ce pays de Quimperlé, de Bannalec, de Pont-Aven est un de ceux que j’ai le plus pratiqués ; les chansons qu’on y a chantées étaient toutes des élucubrations récentes et peu originales d’un poète d’Elliant, ou des couplets d’une origine populaire plus profonde, mais aussi d’une crudité d’inspiration absolument intraduisible. On peut dire, en effet, du peuple de Cornouaille, que…

Sa verve trop souvent s’égaie en la licence.

Mais j’y songe : Quand M. Quellien parle de sonn exquises entendues en Cornouaille, il n’a peut-être en vue que la musique. Là, je me récuse.


  1. Bombard-Kerné, la Bombarde de Cornouailles ; Bepred-Breizad, Toujours Breton.