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MARIE
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   Bonjour, Marie, ma maîtresse, bonjour je vous dis.
Me voici venu vous voir, pour la dernière fois ;

   Me voici venu vous voir, je ne le puis nier,
Pour qu’on fixe le jour où nous serons mariés.

   Venez avec moi, ma maîtresse, trouver mes parents,
Et j’irai aussi avec vous trouver les vôtres.

   — Ah ! dame, mon serviteur, j’ai été trouver mes parents,
Et ils m’ont dit que jamais cela ne se ferait.

   — Venez avec moi, ma maîtresse, à la lisière des bois,
Où l’on entend le vent faire bruire les feuilles ;

   Où les oiseaux chantent leurs fredons,
Pour me réjouir l’esprit, m’égayer le cœur.

   Venez avec moi, ma maîtresse, au bord de la rivière,
Nous promener sur l’herbe verte, pour passer le temps,

   Causer sur l’herbe verte, jusque l’heure du midi,
Ou bien dans votre jardin, sous un buisson de laurier.

   ... L’autre jour j’étais ivre, à choir sur la rue ;
Ma maîtresse était là, qui me regardait d’un œil noir ;

   Ma maîtresse était là, qui me regardait tomber.
— J’ai perdu vos bonnes grâces ! Je vous dis adieu.

   J’aurais voulu, ma maîtresse, quand je vous vis pour la première fois,
Que j’eusse été sur mon lit, trois ou quatre semaines, malade,

   Confessé, muni des sacrements, par un prêtre extrémisé.
Ainsi donc, ma maîtresse, je vous en prie, me consolez !

   — Quelle consolation pourrais-je vous donner,
Sinon vous prendre pour époux et vous demeurer fidèle ?

   — Si vous ne m’êtes pas plus fidèle, dans le temps à venir,
Que vous ne l’avez été, ma maîtresse, dans le temps passé !...