panthéon des gloires celtiques. On commença par reconstruire une littérature nouvelle sur les débris de l’ancienne. Une académie bretonne se fonda, et, naturellement, prit M. de la Villemarqué pour président, ou plutôt pour pilote (penn-sturter). Des nobles, des prêtres, des bourgeois enthousiastes, et même des maîtres d’école en furent les marc'hek, par un K, c’est-à-dire les chevaliers. A chacun on distribuait un diplôme. Ce fut une véritable croisade. L’ « Akademi Vreiz » ne faillit pas au titre qu’elle s’était décerné. Son premier soin fut d’expurger la langue et de réformer l’orthographe. Elle proscrivit impitoyablement tout vocable qui, de près ou de loin, sentait son origine française, et y substitua des termes empruntés à nos congénères d’Irlande ou du pays de Galles. Les mots bretons conservés se hérissèrent de tant de K, qu’ils auraient, pu rendre des points à leurs ancêtres les plus barbares. Evidemment, il y eut dans tout cela quelque puérilité. La tentative avorta. Peut-être en a-t-on trop raillé les promoteurs. Les belles illusions ont toujours un caractère de générosité, qui devrait en imposer au sarcasme. De plus, elles sont généralement fécondes. A la suite de ce mouvement de rénovation bretonne, dont j’ai tâché de fixer quelques traits, des « enquêteurs » consciencieux, stimulés par le succès du Barzaz-Breiz, se mirent en devoir de glaner, derrière M. de la Villemarqué, dans ce vaste champ de la poésie populaire dont il s’était contenté, pensaient-ils, d’engranger les meilleures gerbes. L’un des plus vaillants d’entre eux fut précisément M. de Penguern.
Il était juge de paix à Perros-Guirec, mais habitait à Lannion, au centre d’un pays fertile en traditions de toute nature. Il consacra à les recueillir tous les loisirs que lui laissait sa charge. Sa passion, en ces recherches, n’eut d’égale que sa sincérité. Toutefois, n’ayant qu’une connaissance imparfaite du breton, il dut faire appel à des collaborateurs. Le plus