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Il rencontra alors un personnage qui n’avait guère bonne mine, celui-là, et qui portait une grande faux sur son épaule, comme un faucheur qui va à son travail.

— Où allez-vous ainsi, mon brave homme ? lui demanda aussi celui-ci.

— Chercher un parrain à mon fils nouveau-né.

— Voulez-vous de moi pour parrain ?

— Il faut vous dire, avant, que je veux un homme juste.

— Un homme juste ! Vous n’en trouverez jamais de plus juste que moi.

— Ils me disent tous cela ; mais qui donc êtes-vous ?

— Je suis le Trépas[1].

— Ah ! oui ; alors, vous êtes vraiment juste, vous ; vous n’avez de préférence pour personne, et vous faites bravement votre besogne. Riche et pauvre, noble et vilain, roi et sujet, jeunes et vieux, faibles et forts.... vous les frappez tous, quand leur heure est venue, sans vous laisser attendrir ni fléchir par les larmes, les menaces, les prières ou l’or. Oui, vous êtes véritablement le

  1. En breton, la mort personnifiée (ann Ankou) est du masculin, et c’est pour cela que notre homme la prend pour parrain à son fils, et non pour marraine ; c’est aussi pour la même raison que j’ai cru devoir traduire par le Trépas, au lieu de la Mort.