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comme on ne mourait plus, les hommes étaient de plus en plus malheureux. On les voyait partout levant les mains et les yeux vers le ciel, et criant :

— Mourir ! mourir !... Ô Mort, ayez pitié de nous !

Sans-Souci, touché d’une si grande désolation, dit un jour :

— Ma foi ! j’ai assez vécu comme cela ! C’est toujours la même chose, dans ce monde : des bons et des méchants, des riches et des pauvres, beaucoup de misère et de mal partout, et nul n’est content de sa condition. Je veux aller voir, à présent, ce qu’il y a aussi de l’autre côté. Je vais délivrer la Mort.

Et il revint à sa forge. La Mort y était toujours sur son fauteuil avec son ange à côté d’elle.

Il les éveilla, car ils dormaient profondément, et leur dit :

— Il y a assez longtemps que vous êtes là à rien faire ; partez, à présent, et besognez bien, car on se plaint beaucoup de votre paresse, sur la terre et dans le ciel aussi.

Ils se levèrent aussitôt, sans attendre qu’on le leur dît deux fois, et la Mort, brandissant sa faux, depuis si longtemps inactive, commença par frapper Sans-Souci. Puis elle parut et se répandit par tout le monde, besognant rudement, de