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voyageurs rencontrèrent un château, près de la route.

— Logeons ici, dit le vieux moine.

Ils furent bien reçus du seigneur et mangèrent avec lui à sa table. Le lendemain matin, comme ils se disposaient à partir, une servante leur dit :

— Si vous voulez, mes pères, être bien reçus ici, au retour, vous n’avez qu’à embrasser ce petit enfant qui est là dans son berceau.

Et les deux moines s’empressèrent d’embrasser l’enfant et lui souhaitèrent mille bénédictions de Dieu. Après eux, leur compagnon, s’approchant du berceau, lui donna trois coups de couteau dans le cœur et le tua, sans qu’il fît entendre le moindre cri. Les deux autres n’en surent rien, ayant déjà tourné le dos pour sortir, et la servante aussi. Ils se remirent en route tous les trois.

À quelque distance du château. Innocent dit à ses deux compagnons de route :

— Si vous saviez ce que j’ai fait, dans ce château !

— Qu’avez-vous donc fait ?

— Vous autres, vous avez baisé l’enfant et appelé sur lui la bénédiction de Dieu.

— Eh bien ! et vous, qu’avez-vous fait ?

— Moi, je lui ai donné trois coups de couteau dans le cœur, et je l’ai tué net.