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étaient sur le point d’être révolus, et la tristesse et l’inquiétude du marquis ne faisaient qu’augmenter. Un jour, qu’il se promenait sur la grande route avec son fils, ils rencontrèrent un marchand de pourceaux, qui allait à la foire.

— Voulez-vous prendre ce jeune garçon, pour lui apprendre votre métier ? lui demanda le marquis.

— Je ne demande pas mieux ; il a, ma foi, bonne mine.

— Eh bien ! emmenez-le.

Et il livra son fils au marchand de pourceaux ; mais, en lui faisant ses adieux, il lui glissa dans sa poche une bouteille remplie d’eau bénite.

Le vieux marquis alla ensuite se confesser au recteur de sa paroisse. Le recteur, en apprenant qu’il avait vendu son fils au diable pour de l’argent, ne voulut pas lui donner l’absolution. Il s’adressa successivement à tous les prêtres du pays ; personne ne voulait l’absoudre, et il en était très-malheureux. Enfin, il se résolut à aller jusqu’au Pape, à Rome. Il y alla à pied, avec beaucoup de mal, se prosterna aux pieds du Saint-Père, et se confessa à lui. Mais le Pape aussi ne voulut pas l’absoudre et lui dit :

— J’ai un frère ermite qui habite une petite cabane, au milieu d’un bois, à cent lieues d’ici ; allez le trouver, car il a plus de pouvoir que moi,