— Mon pauvre petit père, si vous m’aimez,
Vous ne me donnerez pas au marquis ;
Ne me donnez pas à Traonlavané,
Car je serais tuée par sa famille !
— Autant vaut que je te livre à lui,
Qu’éprouver malheur de sa part,
(Qu’être exposé) à perdre la vie,
Vous-même, peut-être, petite Jeanne !
Traonlavané disait,
En soupant à la table de sa sœur :
— J’ai été à Paris, à Vannes,
À Saint-Malo, à Saint-Brieuc ;
Jamais je n’ai vu de femme,
Aussi jolie que Jeanne Le Bihan :
Non, jamais je n’en vis aucune,
Elle m’a tourné l’esprit.
Sa sœur aînée répondit
À Traonlavané, quand elle l’entendit :
— Si elle vous a tourné l’esprit,
Demandez-la pour venir dans votre maison ;
Demandez-la pour venir dans votre maison,
Une année ou deux, pour vous servir ;
Une année ou deux pour vous servir,
Et passez votre temps avec elle.
Traonlavané répondit
À sa sœur aînée, sitôt qu’il l’entendit :
— Ma sœur Marie, vous avez péché,
À mal parler ainsi des femmes :
Je n’ai qu’une âme,
Et, si je le puis, elle sera à Dieu :
Sous demain, à midi,
Je l’aurai faite dame de Traonlavané !
Traonlavané disait
En arrivant chez le vieux Le Bihan :
— Bonjour et joie dans cette maison,
Jeanne Le Bihan, où est-elle ?